Construction de références européennes pour les pratiques
Année : 2009
Thème : Recherche : orientée vers la pratique, action, évaluative...
Type : Recherche : orientée vers la pratique, action, évaluative...
Auteur(s) :
LECAPLAIN Patrick (France) – patrick.lecaplain@askoria.eu
Résumé :
Quels référentiels pour les pratiques ? La rationalité de la pratique peut se définir, au sens qu'en donne Max Weber et à sa suite Jürgen Habermas, par la conjonction d'une rationalité instrumentale et d'une rationalité en valeurs. La modernité, selon ces mêmes auteurs, peut s'analyser comme l'avènement d'une rationalité instrumentale colonisatrice des systèmes d'action différenciés.
En ce sens, les systèmes d'intervention sociale en Europe n'échappent pas à ce phénomène de rationalisation.
Durant cette dernière décennie, les guides de bonnes pratiques et l’évaluation constituent des manifestations perceptibles, parmi d'autres, de ces mutations à l'œuvre en Europe. Dès lors, on peut se demander s'il faut le redouter ou s'en réjouir. La méthode comparative utilisée dans le cadre de la recherche Daphné II vient accréditer, d'une part, l'idée selon laquelle il existe des alternatives dans la construction de références dans le champ de l'intervention sociale.
Autrement dit, il y a manière et manières de procéder dans la construction et l'usage de ces références. Le projet Daphné II a été co-construit, dans chacun des pays participants, avec les milieux professionnels et les usagers eux-mêmes. Alors que nous devons à la recherche en intervention sociale une pléthore de modèles de compréhension sur les phénomènes sociaux, nous avons tenté, pour notre part, d'élaborer des recommandations aux seules fins de permettre une réflexion sur les pratiques.
Ce type de recherche, guidé par la production de savoirs sur les pratiques professionnelles plus que sur les phénomènes sociaux eux-mêmes, n'est évidement pas sans lien avec la formation professionnelle initiale ou continue.
Quel formateur, d'école ou de terrain, ne s'est pas heurté, faute d'un véritable travail de formalisation des pratiques professionnelles, à la difficulté de l'apprentissage et de la transmission des compétences ? Dans le cas présent, il ne s'agit ni plus, ni moins que de favoriser et renforcer une dialectique, qui le plus souvent se dérobe pour l'apprenant, entre théories et pratiques.
En d'autres termes, nous en appelons à une réflexivité outillée dans, par et sur l'action telle qu'a pu l'évoquer Donald Schön.
Ainsi, dans sa visée utilitariste, cette perspective de sciences appliquées doit faciliter la formalisation, la capitalisation et la transmission des pratiques dans le champ de l'intervention sociale.
Les résultats de la recherche Daphné II interrogent, d'autre part, la rationalité pratique des actions sociales engagées auprès des jeunes ayant des conduites violentes. Ils permettent notamment de mesurer, qu'en dépit de la diversité des systèmes européens et des pratiques, ces jeunes suscitent des dysfonctionnements spécifiques qui tiennent autant à la violence elle-même qu'à la réaction sociale qu'elle engendre.
Ils révèlent encore que les pratiques de l'intervention sociale sont traversées par des paradoxes qui opposent valeurs et technicité.
L'avènement de l'individu dans le monde contemporain valorise la subjectivité et la liberté du sujet. Ces notions constituent aujourd'hui autant de références axiologiques pour les professionnels de l'intervention sociale. Dans le cas des jeunes ayant des conduites violentes, il apparaît que le recours parfois stéréotypé à la responsabilité, la réflexivité, la prise de conscience de soi et de ses comportements peuvent paradoxalement générer plus de difficultés qu'elles n'en résolvent.
Mots clés :
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