DELAVAL Bernadette (France)

Les liaisons entre le secteur du social et le secteur du sanitaire peuvent bouger à partir du recours à la notion de vulnérabilité pour analyser les problèmes sociaux. Selon le sens attribué à cette notion, une instrumentalisation du social au service du médical est possible. Une coopération entre les deux secteurs suppose une définition sociale de la notion de vulnérabilité.
Dans la plupart des approches, la vulnérabilité est évoquée pour décrire l’état des personnes. Les personnes âgées sont ainsi souvent perçues comme des personnes vulnérables relevant de l’intervention médicale. Le risque encouru par les personnes fragilisées non seulement par des pathologies mais aussi par le manque de supports sociaux légitime l’intervention de soignants. Cependant la réponse médicale s’avère souvent insuffisante et doit se compléter d’une intervention sociale. Le traitement social de la vieillesse est un exemple de l’émergence d’un nouveau paradigme qui interroge les logiques d’action et notamment le rapport entre le social et le médical.
L’ambiguïté et le flou de la notion de vulnérabilité pour décrire les problèmes sociaux marquent un glissement dans l’analyse et dans les modèles d’action. On est passé d’une analyse structurelle à une analyse en termes de pathologie. Depuis que Robert Castel a utilisé la notion de vulnérabilité pour évoquer la montée de l’insécurité sociale liée à la précarité économique et relationnelle, conséquence de l’effritement de la société salariale liant travail et protection sociale, cette notion s’est diffusée dans un tout autre sens. De l’analyse d’un processus, venant de la perturbation d’un système devenu instable, on est passé à l’évocation de l’état des personnes vulnérables qui légitime la prise en charge médicale avec l’appui des intervenants sociaux.