CARBONNELLE Sylvie (Belgique) – scarbonn@ulb.ac.be

Le vieillissement des immigrés constitue une préoccupation récente dans le champ des politiques sociales européennes. Cependant, aborder essentiellement cette problématique sous l’angle des “problèmes économiques et sociaux” rencontrés par, ou avec, les migrants âgés (e. a. accès aux droits, au logement, aux aides, aux soins; différences culturelles), a tendance à construire à leur sujet une nouvelle “catégorie à risque”, et diffuser à leur égard une image généralisante et misérabiliste.
S'interroger sur les spécificités de la condition des immigrés âgés ne devrait pas occulter, d’une part, les similarités de l'expérience du vieillir et du grand âge entre personnes issues de l’immigration et celles ne l’étant pas, d’autre part, la grande hétérogénéité des profils et des conditions de vie de ces populations. Celle-ci renvoie à la fois à l’histoire migratoire des groupes considérés, à leur mode de présence dans le “pays d’accueil”, mais aussi à la diversité des trajectoires individuelles. Leur situation et leur expérience du vieillir sont en effet susceptibles de différer, non en raison d’une qualité d’”immigré”, pensée sur le mode de la réification, mais plutôt d’un ensemble d’éléments qui, selon leur mode d’agencement, génère, lui, des “spécificités” en termes de profils et de besoins.
Afin d'éviter les effets délétères de toutes catégorisation et assignation identitaire, la problématique du vieillissement de ces cohortes en appelle, comme pour la population générale, de tenir compte d’un ensemble de facteurs tels que la dynamique de leurs trajectoires (migratoire, sociale, identitaire), leurs ressources, accommodements, aménagements face aux transitions de l'âge; et enfin, les logiques d'entraide qu'elles et leurs entourages mettent en œuvre.
Il s’agira, afin de concevoir des politiques sociales et des interventions incluant la diversité ces publics, de prendre en considération, outre l’évolution de leurs conditions socio-économiques (mobilité sociale ascendante versus descendante), l’évolution générationnelle au sein des groupes, tant par rapport aux formes d'ancrage dans le pays, au rapport au milieu origine (réel, symbolique) qu’à la transformation des modèles familiaux, des règles et valeurs, notamment en matière religieuse.