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Prise en charge des personnes précaires en médecine générale

Année : 2012

Thème : exemple d’une recherche sociologique de terrain menée avec l’URPS Médecins Nord-Pas-de-Calais

Type : Recherche : orientée vers la pratique, action, évaluative...

Auteur(s) :

DE PAUW Caroline (France) – caroline.de-pauw@laposte.net

Résumé :

Convaincue de l’intérêt de réaliser des recherches en lien avec le terrain, l’URPS Médecins Nord – Pas-de-Calais a accepté de travailler avec une sociologue afin de réaliser une recherche portant sur les conditions de prise en charge des personnes précaires en médecine générale.
8 médecins installés dans des secteurs diversifiés ont participé à cette recherche sociologique. Une ethnographie des cabinets médicaux a permis l’observation de 879 « attentes » et 698 consultations, complétées par les échanges informels et les entretiens semi-directifs avec chaque généraliste. L’objet de cette communication est de vous présenter l’intérêt et les limites de cette démarche qui a été réalisée par une chercheure qui s’est trouvée à la fois doctorante dans un laboratoire de recherche, tout en étant salariée de l’URPS Médecins.

S’agissant d’une recherche sociologique sur la médecine générale et non pas en médecine générale, il a fallu développer une méthodologie permettant « d’aller à la rencontre de médecins généralistes pour accéder à leurs pratiques et représentations, avant de les réfléchir à la lumière des productions de la sociologie » (Bloy et Schweyer, 2010) :présence au long cours ; parti pris d’observer les manifestations de la précarité tant dans les cabinets situés dans différents secteurs mais également tous patients confondus, sans utiliser des catégories préétablies que ce soit en consultations ou en salles d’attente. La mise en œuvre de cette méthodologie a présenté des difficultés d’ordre éthiques ou méthodologiques qui pourront être développées lors du colloque.
La présence de longue durée sur le terrain a permis d’accéder aux pratiques routinières des médecins généralistes. Par ailleurs, sans avoir jamais porté de jugement sur leurs pratiques ou les avoir incités à un quelconque changement, la présence du sociologue semble les avoir fait réfléchir et modifier leurs pratiques, notamment en intégrant davantage la « dimension sociale » de leurs patients (profession, situation familiale, droits santé etc.).

Au-delà de permettre un accès direct au terrain de recherche, le statut de salarié d’une instance représentative du groupe professionnel observé a permis de réaliser des recherches de meilleure qualité que si elles avaient été réalisées en dehors de cette structure. En effet, cette situation impose d’asseoir les différentes analyses faites suite aux observations, permettant ainsi de ne pas tomber dans la caricature en généralisant des cas particuliers, de ne pas faire de jugements trop hâtifs en essayant de bien cerner la complexité de la situation. S’il est évident que le chercheur doit rester en bon termes avec les médecins de son terrain, l’analyse n'en a pas été expurgée pour autant puisque le but n’était pas de qualifier ou de porter un jugement sur les médecins qui avaient accepté les observations mais d’analyser leurs pratiques (savoir-faire et savoir-être) et étudier si certaines étaient transmissibles. Pour ne pas être remise en cause, tant par les sociologues que par les médecins, le raisonnement a été factuel, circonstancié et la perspective d’une confrontation avec les médecins ayant participé à l’étude a permis d’éviter de dériver dans une critique excessive et de se concentrer sur une logique compréhensive de l’objet.

L’analyse montre que les médecins sont en situation d’anomie en ce qui concerne la prise en charge des personnes précaires. Incertitude et absence de règles entraînent des pratiques hétérogènes qui ont un impact pour les patients, certaines vont renforcer les inégalités sociales de santé quand d’autres vont contribuer à leur réduction.
Les sollicitations reçues pour présenter mes travaux de recherche auprès de publics médicaux montrent la volonté des médecins généralistes d’améliorer leurs pratiques et renforcent l’idée d’un lien nécessaire entre les sciences médicales et la sociologie de la santé.

Mots clés :

Santé, Bonne pratique, Recherche-action, inégalités sociales de santé

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