BESLAY Christophe (France)
GOURNET Romain (France) – gournetromain@yahoo.fr
ZELEM Marie-Christine (France) – zelem@univ-tlse2.fr

La précarité énergétique renvoie à des situations complexes de pauvreté, combinées à un logement mal isolé et mal chauffé. Inconfort thermique, insalubrité, insécurité, problèmes de santé, impayés d’énergie, désocialisation… en sont les principales conséquences. Une analyse sociotechnique comparée de cinq dispositifs de réduction de la précarité énergétique (Haute-Savoie, Gers, Tarn, Québec et Guyane) a montré que les dispositifs communément mis en œuvre restent relativement impuissants pour résorber ce phénomène. Des solutions existent, mais elles supposent de modifier les prises en charge « au cas par cas » par une intervention « de masse » qui revêt un caractère inhabituel et innovant dans l’action sociale.

La plupart des dispositifs relèvent d’une approche curative et spécialisée, soit en termes d’aide à la personne, attribuée sans prendre en compte la qualité énergétique des logements, soit par des aides à la pierre ou aux travaux sans prise en compte de la situation des occupants. Face à la précarité énergétique, les travailleurs sociaux de terrain se sentent démunis, sans disposer des leviers d’action pour traiter les situations. Ce sentiment d’impuissance est renforcé par le manque de compétences techniques, par la multiplication des tâches, par l’arrivée de nouveaux publics non « clients » de l’action sociale et par la lourdeur des procédures d’intervention.

L’enjeu est de construire des programmes d’action et des outils pour appréhender et traiter de manière globale les situations. L’étude comparative nous a amenés à concevoir un dispositif d’intervention innovant, actuellement en expérimentation dans le département du Gers : un Service Local d’Intervention pour la Maîtrise de l’Energie (SLIME) qui repose sur les quatre principes suivants :

1. Pragmatisme et faisabilité, avec une organisation proactive capable de prévenir, d’anticiper et de traiter rapidement les situations. Il ne s’agit pas de traiter le bâti, régler les problèmes financiers, assister les ménages ou se substituer aux obligations des bailleurs défaillants, mais d’améliorer le confort, de rendre le logement plus sain et d’améliorer les conditions de vie.

2. S’affranchir des définitions a priori de la précarité énergétique. Les situations sociales renvoient à des équilibres « instables » et complexes, difficilement réductibles à une définition stricte. Une approche ouverte laisse la possibilité de prendre en compte toutes les situations de « mal-être habitationnel » et d’orienter ou non vers une prise en charge spécialisée, à partir d’un diagnostic sociotechnique de la situation.

3.Déconnecter l’intervention sociotechnique du cadre de l’action sociale pour éviter d’assimiler les problèmes énergétiques à des problèmes sociaux, de restreindre le champ d’identification et de signalement, d’en faire une nouvelle attribution du travail social déjà largement saturé, d’introduire des effets de stigmatisation et de laisser en marge les plus réfractaires au travail social.

4.Un dispositif de réduction de la précarité énergétique articulant trois niveaux d’intervention :

a)Un niveau « micro », par une Équipe Légère d’Intervention Rapide, conseillers en maîtrise de l’énergie qui orientent, préconisent des astuces et installent de petits équipements qui procurent d’emblée une amélioration du confort. Ils favorisent la compréhension et la prise de conscience par les ménages de l’impact des gestes quotidiens et des différents équipements sur les consommations d’énergie.
b)Un niveau « méso » pour un traitement à moyen terme (petits travaux) des problèmes rencontrés par les ménages, par un Socio Technicien Spécialisé .
c)Un niveau « macro » renvoyant aux dispositifs et aux programmes d’action classiques pour un traitement de fond des situations sociales et du bâti.

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