Une « organisation apprenante » formant ses praticiennes et praticiens à intervenir en contexte de vulnérabilité et d’exclusion sociale afin de soutenir le développement de la communauté territoriale.
Année : 2012
Thème : Il s’agit d’un projet de formation initié par un centre de santé et de services sociaux québécois dont l’objectif est de transformer les attitudes et pratiques de ses employés à l’égard des personnes vulnérables et exclues et d’ancrer davantage les pratiques de l’institution dans la communauté locale. Quatre blocs de formation et d’ateliers d’une durée de trois heures sont prévus à cette fin.
Type : Analyse d'expérience : d'intervention, de formation, de recherche...
Auteur(s) :
DALLAIRE Nicole (Canada) – nicole.dallaire@usherbrooke.ca
Résumé :
La formation dont il sera question dans cette présentation s’insère dans un contexte national qu’il faut mettre tout d’abord en perspective. En effet, au Québec, l’approche de gestion Lean se répand dans le réseau institutionnel et menace l’autonomie professionnelle des travailleurs sociaux. Elle vise à « accélérer la vitesse des processus par l’élimination des tâches sans valeur ajoutée » (Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec, 2011), à éradiquer le gaspillage et à réduire la variabilité dans le processus de production des services. On mesure facilement comment il est difficile d’en juger dans le cadre complexe d’une relation d’aide. Parallèlement, un nouveau référentiel de compétences des travailleurs sociaux vient d’entrer en vigueur. Celui-ci se caractérise par l’importance accrue qu’il accorde au développement de la réflexivité et de la pensée critique des intervenants, à leur engagement dans la réduction de la pauvreté et de l’exclusion ainsi qu’à leur implication dans l’évolution de leur profession. Enfin, les centres de service sociaux et de santé québécois (CSSS) sont désormais tenus, en vertu d’une loi, de maintenir et d’accroître la santé et le bien-être de la population de leur territoire et en conséquence d’intensifier leurs actions sur les déterminants sociaux de la santé.
C’est dans ce cadre que le centre de services sociaux et de santé de la Beauce (CSSSB) s’est engagé à former son personnel ainsi que des partenaires du milieu communautaire, afin qu’ils interviennent, ensemble, de façon plus communautaire auprès des personnes en situation de vulnérabilité ou d’exclusion. Cette innovation fait partie intégrante du volet « développement des communautés » de la planification stratégique de l’organisme, lequel veut transformer ses pratiques à partir d’une posture d’organisation apprenante. C’est en tenant compte de ce contexte dans l’analyse, que le dispositif de formation sera présenté et critiqué, de façon à en faire ressortir les éléments essentiels et les principaux enjeux.
Ce projet de formation est en marche depuis deux ans. Il comporte quatre blocs de trois heures, répartis sur une année. La conception, le déroulement et le suivi de la formation sont pilotés par un comité multidisciplinaire formé de cadres, de conseillers cliniques, d’intervenants, d’acteurs de la santé publique et d’une professeure en travail social. Le CSSB fait ainsi le pari d’offrir une formation favorisant la construction d’une vision partagée de la vulnérabilité sociale et de l’exclusion, ainsi que des situations d’oppression, de stigmatisation et de non recours à l’aide qui en découlent. Les savoirs expérientiels des intervenants sont activement sollicités et intégrés en cours de processus Il est aussi souhaité que cette formation influence l’action sur les déterminants sociaux de la santé dans ce territoire et réduise les inégalités de santé. La formation vise l’accentuation de pratiques d’interventions multidisciplinaires, reliées aux réseaux de soutien et de collaboration de la communauté et arrimant le travail des cliniciens à celui des organisateurs communautaires et des organismes de la communauté.
Les cadres s’engagent à ouvrir le débat sur les aménagements des conditions de travail et sur les mécanismes de reddition de compte nécessaires à l’actualisation de ces changements de pratique. De plus, un dispositif de suivi collectif s’insérant entre les blocs de formation se met en place afin de favoriser une appropriation active, collée aux situations de pratiques auxquelles les intervenants font face au quotidien. Enfin, cette formation implique des intervenants de l’organisation afin qu’ils soient en mesure de continuer d’animer la formation après le départ de la professeure qui les a accompagnés dans ce processus. Ce type de formation professionnelle, issu du travail social, apparaît comme un élément essentiel de la sauvegarde de pratiques d’intervention critiques, orientées vers la communauté.
Mots clés :
Exclusion, Intervention sociale et travail social, Co-construction
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