Chercheur collectif et sciences de l'éprouvé

Année : 2010

Thème : Analyse d'expérience : d'intervention, de formation, de recherche...

Type : Analyse d'expérience : d'intervention, de formation, de recherche...

Auteur(s) :

DUMONT Jean-Frédéric (France) – jfdumont@msn.com

Résumé :

Confrontés à l’urgence de situations de plus en plus ancrées dans la multi-référentialité et nécessitant des réponses plurielles et complexes, les professionnels de terrain cherchent un nouveau souffle en tentant de se doter d’une légitimité et d’une éthique leur permettant d’articuler logiques technicho-rationelles et valeurs humanistes.
Cette légitimité s’est longtemps forgée dans une navigation éthique, entre les nécessités de l’inscription dans le lien social et celles liées à la singularité des acteurs. Le point de fuite de ces perspectives résidant dans l’évitement du contrôle social…

Or, ce qui caractérise aujourd’hui l’action socio-éducative, c’est justement l’absence de perspectives claires, bien identifiées, permettant aux travailleurs sociaux d’articuler humainement-professionnellement commande sociale et intérêt supposé des personnes accompagnées.
Les professionnels de terrain sont aujourd’hui confrontés à une perte du sens de leur action (le sens étant entendu comme orientation/direction, signification et sensibilité) en même temps qu’à une multiplication, un foisonnement des repères (représentations sociales, valeurs, idéologies…) sur lesquels se fondent ces actions.
Dilution du sens et atomisation des repères provoquent bien souvent dans la profession une perte du sentiment de contrôle des actions socio-éducatives…

C’est en travaillant sur ces trois dimensions de leur implication professionnelle (Sens – Repères - Sentiment de contrôle) que les travailleurs sociaux parviendront à forger de nouvelles identités professionnelles. (Bataille, Mias, Dumont, 1998, 2007, 2009)
Ce travail nécessite moins des temps de formation qu’une réelle dynamique de recherche. Autrement dit, les travailleurs sociaux ont moins besoins d’experts, de formateurs leur expliquant le monde tel qu’il va, ou tel qu’il ne va pas, que de pouvoir se réunir collectivement afin de se situer dans une dynamique de recherche, d’innovation et de transformation sociale et professionnelle.

Le pari que je ferai ici, c’est que les travailleurs sociaux ont moins besoin de se (re)trouver que de s’inventer. Cela nécessite un déplacement, un changement de posture, où le professionnel ne peut s’envisager que dans la double identité d’un praticien-chercheur. Et ce chercheur ne peut être qu’un chercheur collectif où les praticiens viseront non pas le développement durable de leur identité (le développement peut-il vraiment être durable ?) que l’actualisation-transformation de cette identité professionnelle dans un but de transformation sociale.

Autrement dit, la question de l’identité professionnelle ne peut se travailler qu’en pensant global pour agir local, dans une dimension collective de recherche-action où le politique et l’idéologie auront un rôle majeur à jouer.
L’identité, l’éthique et la légitimité des travailleurs sociaux en général et des éducateurs en particulier, ne trouveront matière à s’inventer, se transformer et s’actualiser que collectivement, dans une articulation, une reliance et une alliance entre praticiens, chercheurs et personnes accompagnées, dans un objectif de transformation sociale…

A partir d’une recherche diachronique et longitudinale (2007/2009) consacrée à la professionnalisation des éducateurs, je tenterai de faire apparaître un cadre méthodologique permettant la mise au travail des implications et des identités professionnelles par la mise en place de chercheurs collectifs, dans une logique de recherche-action où la connaissance est co-construite et coproduite collectivement.

Mots clés :

secteur socio-éducatif, quête du sens, rationalisation, épistémologie méthodologie recherche-action

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