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SAVOIR DU DESIR ET DESIR DE SAVOIR

Année : 2013

Thème : Comment former les futurs professionnels du Travail Social aux questions de genre et de sexualité ?

Type : Analyse d'expérience : d'intervention, de formation, de recherche...

Auteur(s) :

DESMONS Patrice (France)

Résumé :

- SAVOIR DU DESIR ET DESIR DE SAVOIR-
Comment former les futurs professionnels du Travail Social aux questions de genre et de sexualité ?

Dans le contexte du Travail Social où le statut du savoir est très problématique, traversé des tensions et des contradictions entre les savoir-faire, facteurs de compétence, les savoir-comprendre, facteurs de reproductibilité, et les savoirs critiques facteurs de transformation, former les futurs professionnels aux questions de genre et de sexualité est à la fois une gageure et un enjeu qui peut devenir central et symptomatique de toute une conception de la professionnalité.
On montrera en quelques mots qu’aujourd’hui, en regard des bouleversements produits dans le champ des savoirs et des pratiques, depuis les « gender studies » et les « queer studies », les questions de genre et de sexualité sont l’objet de profondes transformations dans le champ social, dans le champ idéologique et dans le champ théorique.
Dans ce contexte, il n’est plus possible pour un professionnel et un futur professionnel du secteur sanitaire et social, de se tenir à l’écart de ces transformations et de continuer à aborder ces questions comme si de rien n’était, depuis des « valeurs », des expériences et des représentations seulement « personnelles » ou sociales, non interrogées. Ce contexte est au contraire l’occasion, voire la nécessité de construire des approches non normatives de la vie affective et sexuelle, selon une éthique qui permette aux professionnels d’être autre chose que des agents de reproduction de la norme comme on le croit souvent.
Mais ce n’est pas facile : car du savoir sexuel, il n’en manque apparemment pas ! Entre la médicalisation, la sexologisation, la psychologisation, la psychanalysation, la sociologisation voire la médiatisation du sexuel, cette « volonté de savoir », comme le montre Michel Foucault, est très souvent guettée par une volonté de pouvoir soucieuse d’affirmer depuis un dispositif de « vérité » la frontière entre les « bonnes pratiques » et les « mauvaises pratiques », frontière sous tendue par des conceptions inévitablement normatives, « biopolitiques ». Cette question devient centrale à l’époque actuelle, de « pornopharmacologisation » comme dit Beatriz Preciado, où se débrouiller seul, c’est risquer d’être vite déboussolé.
Alors comment faire ?
On montrera comment, en menant parallèlement une réflexion philosophique, « politique » et pédagogique de déconstruction des savoirs « savants », et en sollicitant des savoirs produits par les acteurs eux-mêmes qui sont alors les sujets et les objets de ces savoirs (par exemple les personnes LGBTIQ, ou des personnes handicapées, mais aussi les professionnels et tout un chacun), une autre manière de construire, de transformer et de transmettre les savoirs émerge peu à peu ici, à la condition de dénouer le dispositif traditionnel des supposés savants et des supposés ignorants.
On verra ainsi qu’à la « volonté de savoir » pourrait se substituer un désir de savoir qui finit par trans-former le savoir du désir, et que cette substitution peut peut-être refonder la capacité des professionnels du Travail Social à construire une nouvelle alliance avec les « usagers », sollicités dans leur propre savoir au-delà de ce qui les exclut ou les invalide.

Mots clés :

Genre, Éthique et déontologie, Norme

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