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Initiation à la recherche et construction de savoirs à partir de la souffrance tsigane et du devoir de mémoire

Année : 2013

Thème : Analyse d'expérience : d'intervention, de formation, de recherche...

Type : Analyse d'expérience : d'intervention, de formation, de recherche...

Auteur(s) :

VEYRIÉ Nadia (France) – nveyrie@irtsnormandiecaen.fr
LECLERC Rosalie (France)
BERTOLI Sébastien (France) – sbertoli@club-internet.fr

Résumé :

Afin de témoigner de la construction des savoirs, nous évoquerons notre travail engagé entre étudiants en formation d’Assistant de service social – encadré par des formateurs – en Institut régional du travail social (Basse-Normandie, France) et une association. Le travail est fondé sur une initiation à la recherche et à la méthodologie de l’expertise sociale dont les objectifs sont d’explorer un territoire, de recueillir des informations sur un problème, une population, ceci en vue de formuler des préconisations en lien avec le terrain.
Dans le cadre d’un partenariat entre l’IRTS et l’Association pour une citoyenneté active entre les sédentaires et les voyageurs qui valorise socialement, culturellement et économiquement les gens du voyage, une proposition d’étude sur la souffrance tsigane et le devoir de mémoire a été formulée. Ceci en vue de recueillir des témoignages et de comprendre la mémoire des familles tsiganes. Dans toutes les familles tsiganes, des personnes ont été touchées par l’internement dans les camps de la Seconde Guerre mondiale. Leur vie et leur parcours s’en sont trouvés altérés. Ce travail a été orienté sur l’éventuelle existence d’un camp d’internement de la population tsigane pendant la Seconde guerre mondiale à Valognes, petite ville située dans le département de la Manche et dans la région Basse-Normandie.
Pendant l’exploration sur le terrain, une absence de traces mémorielles – matérielles, écrites, témoignages – a rapidement été mise en évidence. Un recueil de nombreux témoignages de la population valognaise et tsigane a été effectué. Au fil de notre recherche, il semblait que la « mémoire collective » (Halbwachs, 1997) était invisible. Différentes archives, notamment les mémoires d’un ancien prisonnier du camp, ont été réunies. Peu à peu, il a été élaboré un contournement de ce silence afin de recueillir des éléments qui permettraient d’attester de l’existence d’un camp de travail.
La population tsigane d’une commune avoisinante a été rencontrée. Dans ce travail, comme le montre Paul Ricœur, la mémoire qui se voudrait fidèle au passé ne peut être dissociée de l’affect et du sensible (2000). Or, un constat est apparu : les tsiganes interrogés avaient une volonté très forte de transmission de leur histoire familiale et de leur mémoire de la Seconde guerre mondiale. Les personnes rencontrées ont confié n’avoir jamais été sollicitées pour en témoigner et souhaitaient que leur histoire soit reconnue. Elles ont été sensibles à cette démarche et les étudiants en travail social ne s’attendaient pas à une telle confiance accordée dans cette écoute.
À l’issue de ces recherches, plusieurs préconisations d’intervention ont pu être transmises au commanditaire autour d’un travail en pluridisciplinarité, en partenariat, notamment avec une association nationale qui milite pour la reconnaissance des camps, du prolongement du recueil des témoignages auprès des populations concernées et de l’information des populations locales pour affirmer un devoir de mémoire (Levi, 1997 et Jankélévitch, 1996).
À partir de cette démarche, n’est-il pas intéressant de mettre en évidence une production de connaissances ? De plus, cette démarche ne permet-elle pas de constater des liens entre le travail social et l’histoire ? N’est-il pas alors fondamental de révéler une mémoire vivante ?

Mots clés :

Citoyenneté, Responsabilité, Savoirs, mémoire, gens du voyage

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