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La « fabrication du travailleur social » : analyse de l’intériorisation de la formation chez les étudiants en travail social

Année : 2013

Thème : Recherche : orientée vers la pratique, action, évaluative...

Type : Recherche : orientée vers la pratique, action, évaluative...

Auteur(s) :

CREUX Gérard (France) – gerard.creux@irts-fc.fr

Résumé :

La présente communication s’inscrit dans l’axe 3 de l’appel à communication. Elle est la suite d’une recherche présentée lors du précédent congrès de l’AIFRIS (2011) et qui portait sur une analyse des lettres de motivations des candidats aux concours d’entrée à une formation de travailleur social. Nous avions pu ainsi avancer que si la dimension vocationnelle était toujours présente, elle ne suffit cependant pas pour rentrer dans un centre de formation, encore faut-il pouvoir se projeter dans la profession.

Cette recherche s’est poursuivie non plus en direction des candidats, mais des étudiants en formation. En effet, l’apprentissage professionnel des travailleurs sociaux, inscrit dans une logique d’alternance, peut être analysé du point de vue de son contenu (relatifs à la législation par exemple), à partir du de ceux qui vont la mettre en place, de ceux qui vont transmettre le savoir et enfin ceux qui vont le réceptionner. Et c’est sur ce dernier point que nous allons axer notre travail. Quand bien même les centres de formation peuvent y mettre leur touche, le diplôme d’État garantit une reconnaissance qui n’est pas discutable. Mais ça ne dit cependant rien de la manière dont le futur étudiant intériorise les savoirs issus de la formation et se construit en tant que futur travailleur social et c’est cet aspect que nous proposons d’interroger.

Si l’on s’en tient au sociologue E.C.Hughes, la socialisation professionnelle est « conceptualisée comme initiation, au sens ethnologique du terme, et comme conversion de la personne, au sens religieux, à une nouvelle façon de voir le monde ». Cet aspect est d’autant plus intéressant que ce qui caractérise selon nous l’habitus des travailleurs sociaux est la « vocation ». En effet, le rôle de la formation a pour objet d’amener les futurs travailleurs sociaux à intérioriser cette vocation et en même temps à jouer sur la méconnaissance des déterminismes qui la rendent possible. Ainsi, C.Suaud note à propos de la formation des prêtres que « La manière dont sont sélectionnés les futurs prêtres a pour effet de les amener à intérioriser un projet de vie sacerdotale dans des conditions qui lui confèrent toutes les garanties que peut présenter un « choix » librement consenti ». Et le modèle de recrutement des travailleurs sociaux, fondé sur le concours, permet de sélectionner les « meilleurs éléments », du moins les plus aptes à recouvrir durablement cette vocation. Il est nécessaire de souligner que le taux d’abandon des étudiants en travail social est relativement faible, et interroge de fait leur engagement « sans réserve ».

Pour tenter de comprendre comment s’opère la « reconversion identitaire » (C.Dubar), nous nous appuierons sur la notion développée par E.C.Hughes, à savoir la « fabrication du médecin ». Selon le sociologue, le processus de socialisation professionnelle s’articule autour de quatre phases : la séparation du futur professionnel avec le monde profane, le passage à travers le miroir qui consiste à apprendre à « regarder le monde de derrière soi en sorte qu’on voit les choses écrites dans le miroir », un dédoublement du Soi et enfin une identification au rôle professionnel. À travers ces différentes étapes, il s’agit de faire ressortir les transformations que va subir l’étudiant dans sa construction identitaire.

Afin d'analyser au mieux ce processus, cette communication est basée sur un travail de terrain, sur la base d’une démarche qualitative, mené auprès d’une cohorte de 20 étudiants en travail social (assistants de service social, éducateurs spécialisés, éducateurs de jeunes enfants, moniteurs-éducateurs et aides médico-psychologiques). Commencées en septembre 2011, deux séries d’entretiens (en début de formation et en fin de première année) ont déjà été menées auprès des étudiants et c’est à partir de ce premier travail que nous présenterons les premiers résultats de cette recherche.

Mots clés :

Formation, Transfert des connaissances, Analyse de discours

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