Vies transnationales, professions locales: logiques d’action des travailleurs sociaux migrants
Année : 2012
Thème : Pratiques de coopération et d'interculturalité des professionnels du social avec une expérience migratoire
Type : Recherche : orientée vers la pratique, action, évaluative...
Auteur(s) :
BOLZMAN Claudio (Suisse) – Claudio.Bolzman@hesge.ch
Résumé :
Cette communication s’interroge sur comment les travailleurs sociaux migrants articulent dans leur vie quotidienne une culture professionnelle plutôt orientée vers l’intervention sur le plan national (local) et des expériences de vie marquées par des influences transnationales. Elle s’intéresse plus particulièrement à la manière dont ces travailleurs sociaux vivent et construisent des formes de transnationalisme par rapport à leur État d’origine, en particulier en contribuant à des activités liées au développement
Cette question n’est pas évidente. En effet, même si le travail social est influencé par la circulation des idées au niveau international, il s’agit avant tout d’une activité professionnelle liée à des réalités nationales bien précises. Ses buts sont notamment de soutenir des personnes en difficultés, de prévenir la marginalisation ou de lutter contre l’exclusion et la pauvreté à partir des instruments qui permettent les législations locales, régionales et nationales au sein d’un Etat.
D’autre part, les vies des migrants sont construites concrètement à travers des espaces sociaux qui traversent les frontières nationales. Non seulement leurs familles, leurs réseaux sociaux et leurs liens économiques se trouvent inscrits dans plusieurs Etats, mais c’est le cas également de leurs imaginaires et de leurs affects. Ils sont insérés, souvent de manière simultanée, dans un ici et un ailleurs auxquels ils se sentent appartenir, sans que cela signifie trahir l’une de leurs appartenances.
Les travailleurs sociaux migrants partagent des expériences concrètes de transnationalisme avec d’autres migrants, mais ils partagent aussi les grandes lignes de la culture professionnelle des travailleurs sociaux de l’Etat où ils exercent leur métier. Comment s’articulent-ils ces deux dimensions dans leurs vies?
Il n’y a guère d’études sur les travailleurs sociaux migrants et le transnationalisme, à la différence de ce qui se passe dans d’autres professions, comme la santé ou les sciences dites dures. Si le travail social a attiré moins l’attention des chercheurs jusqu’à présent, c’est probablement parce que c’est un domaine où la question de la « fuite des cerveaux » s’est posé de manière moins aigue que dans d’autres secteurs professionnels. Etant donnée la relation étroite entre politiques sociales nationales et travail social, le transfert de compétences d’une société à une autre rencontre plus d’obstacles que dans le domaine de la santé par exemple.
A partir des entretiens informels avec 30 travailleurs sociaux d’origine latino-américaine, africaine et d’Europe de l’Est, nous proposons une typologie des formes de travail social, en lien avec le transnationalisme et l’aide au développement.
Les migrants sont souvent considérés comme des populations-cibles du travail social. Nous tenterons de mettre en évidence qu’ils peuvent être aussi des acteurs du travail social et qui, de par leurs expériences de vie et leurs trajectoires professionnelles, ils peuvent apporter de perspectives novatrices, soit dans les manières de pratiquer le travail social, soit dans les manières de combiner vie professionnelle et engagement citoyen.
Au delà des formes variées qui prend l’engagement transnational des travailleurs sociaux que nous avons suivis, les exemples présentés posent la question plus fondamentale du sens du travail social aujourd’hui et surtout de ses espaces d’intervention. En effet, dans un monde où la globalisation tend à montrer les interconnexions étroites du système mondial, comme on peut l’observer lors de la crise financière et économique actuelle, on ne peut plus faire l’économie d’une interrogation sur le besoin d’un travail social transnational et sur les formes qu’il pourrait prendre.
Mots clés :
Travail social international, Solidarité, Acteur de développement, transnationalisme
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