DUVAUCHELLE Alain (France) – aduvauchelle@irtsnpdc.fr

En tant que pédagogue, formateur auprès des Educateurs Spécialisés et des Moniteurs Educateurs, je me suis souvent demandé comment je peux faire émerger l’engagement dans la relation éducative pour ceux qui éprouvent des difficultés à entrer en relation avec la personne accompagnée ?
Gaberan rappelle la définition de l’engagement proposée par Condillac (1). Selon lui, l’engagement est d’abord un « acte volontaire ». Il est « l’acte par lequel on engage une chose, par lequel on s’engage à faire quelque chose ». Nous pouvons compléter par ce que dit Lemay de la définition de la relation éducative (2). L’éducateur, professionnel de l’action éducative, implique tout autant son corps (physique, voix, attitudes, mimiques…), ses idées, ses compétences, ses valeurs et ce dans le respect de la personne, des lois, de l’éthique. Il exerce néanmoins dans le cadre d’un contrat de travail avec pour missions de répondre à des projets (institutionnels, collectifs, individuels) et/ou à les conduire. La relation éducative est issue « d’un mouvement mutuel et réciproque » qui va relier « deux partenaires qui interagissent » en fonction « d’un statut, d’un rôle, d’attentes et de représentations » (3).
Dans mes fonctions professionnelles, et au travers de mes expériences d’acteur et de metteur en scène, je suis chargé de l’organisation des sessions de Techniques Educatives (Arts Clownesque, Théâtre, Activités manuelles, Poterie…) et de l’Animation Pédagogique avec pour thématique « Comment la culture aborde les questions du travail social ? » (projections de films, lectures de romans ou d’articles, expositions de photos ou de peintures montées par des étudiants…).
Les retours des artistes à qui je confie l’animation des sessions des Techniques Educatives déterminent une véritable démarche pédagogique. En séance, l’animateur rappelle que l’art oblige à agir pour exister ou faire exister quelque chose (créer une scène de théâtre, faire une photo). Il est issu de la volonté de représenter ou d’une intention que fait exprimer le formateur (avoir le projet de réaliser de telle ou telle manière). Il est la concrétisation d’une idée avec le soutien de l’artiste-formateur (donner une forme à une poterie). L’art suppose d’investir la voix (le clown), le physique (la poterie), des idées de projet (activités manuelles). Certaines expressions artistiques comme le théâtre nécessite une interaction adaptée et arrangée avec d’autres (lors d’une scène de colère : l’un exprime, l’autre la reçoit après s’être accordés sur la manière de faire).
Autre expérience, le partenariat avec le théâtre de la Rose des Vents de Villeneuve d’Ascq permet aux étudiants de découvrir le théâtre (par une visite, par une rencontre avec les artistes), de faire du théâtre (une journée d’apprentissage), d’assister à des représentations (qui oblige à être à l’heure, à écouter et à voir… et qui amène à éprouver des sensations et des sentiments), de commenter (par exemple en partant d’une émotion, d’un ressenti ou d’une phrase élaborer un mini-spectacle devant les artistes). L’étudiant apprend à se positionner, à évoquer ses émotions, à s’investir dans un projet collectif.
Lors des bilans, les étudiants évoquent cette sensation de « se mettre en avant », « d’aller au devant », « de faire avec ce que l’on est (physiquement et moralement)», « de donner », « de dépenser de l’énergie », « de ne pas pouvoir se cacher sur scène ou au travers des photos », « d’agir avec les autres en fonction de ce qui a été prévu».
Les activités artistiques peuvent être l’occasion pour les étudiants d’apprendre à s’engager à faire. Les étudiants peuvent réinvestir ce vécu auprès des personnes accompagnées par le biais d’ateliers artistiques ou en construisant des partenariats avec des lieux culturels.

Savoir être, Savoir-faire, Formation, Engagement