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A l'épreuve des violences adolescentes

Année : 2013

Thème : Du jeu entre les savoirs référentiels et les savoirs pratiques

Type : Analyse d'expérience : d'intervention, de formation, de recherche...

Auteur(s) :

PETRY Philippe (France) – petry@club-internet.fr

Résumé :


Comment former des éducateurs au travail avec les violences adolescentes (en formation initiale et continue)? Cette communication part en effet d’une double pratique : en formation initiale auprès d’éducateurs spécialisés et en formation continue auprès de multiples institutions et surtout dans une importante association œuvrant dans le secteur de l’enfance en danger.
En formation initiale, il est bien entendu possible de proposer des référentiels théoriques permettant une compréhension des phénomènes de violence en institution. Des références psychanalytiques ou systémiques peuvent fournir des grilles de lecture pour articuler la relation éducative singulière avec des éléments d’histoire familiale et des enjeux institutionnels. On peut travailler sur des cas, faire des exercices d’analyse de situation. Cela reste un peu formel.
En formation continue,il s’agit d’aider à faire face au quotidien aux actes posés par des jeunes qui mettent à l’épreuve les équipes.
Un référentiel de compétences théoriques ne suffit plus, il s’agit de savoir pratique à mettre en œuvre dans l’action.
Ces interventions auprès des équipes en formation continue, permettent une nomination des formes de violence par les équipes, un travail sur la souffrance et l’usure professionnelle. Là se crée du tissu institutionnel vivant, du collectif aux prises avec la complexité des pratiques. Ces collectifs peuvent interroger le sens de leurs interventions parmi plusieurs hypothèses d’interventions possibles et soutenir des controverses sur la légitimité de leur action.
Ce travail implique l’élaboration des controverses en justification plutôt que la mise en œuvre de grille de lecture théorique.
Thomas Périlleux en montre l’importance : « le dialogue professionnel active des forces de rappel, en engageant chacun des membres du collectif de travail à argumenter de ses choix relativement aux valeurs et aux règles de métier ….élucider ce qu'il fait autant ce qu'il aurait pu ou dû faire dans son activité. » (Perilleux, 2008, p.83)

Cette mise au travail de la question « qu’est-ce qu’une norme sensée pour nous et pour les jeunes, relativement tenable et utilisable par tous ?» est indispensable car ces jeunes apportent les questions qui les travaillent sur la scène de l’institution, les éducateurs doivent en répondre en faisant face à l’épreuve des transgressions. Cela suppose, pour résister à l’épreuve de pouvoir travailler collectivement la normativité en explorant les différentes versions du jeu avec les limites dans des scénarios de transgression/sanction. Petit à petit, les éducateurs peuvent renoncer à la recherche d’une réponse unique à tenir à tout prix. Les équipes peuvent alors travailler en acceptant des variantes selon le style de chacun ; celles-ci deviennent repérables et relativement prévisibles c’est ainsi qu’une solidarité face à l’épreuve se reconstruit en acceptant la diversité des styles de chacun. On voit bien qu’on est loin ici d’une prescription de normes ; nous sommes dans le travail clinique en situation ou la normativité est remise à l’épreuve dans chacun des choix quotidiens d’intervention toujours guettés par une réponse sur mon mode action/réaction.
Ceci constitue probablement « l’épreuve de professionnionalité » propre au métier éducatif. Ce processus est bien plus nécessaire mais aussi bien plus fragile qu’une norme écrite, il est toujours à reprendre avec constance car il peut se déliter rapidement.
Yves Clot dans ses travaux sur la clinique de l’activité, rappelle que les normes écrites, ne sont pas capables de prescrire le travail réel. Il a largement démontré la part d’ingéniosité que doivent déployer les acteurs en situation de travail pour que les normes prescrites puissent avoir une chance d’être mis en œuvre. Il ne s’agit pas d’application des normes mais de jeu dans et avec les normes pour les faire vivre au sens de Canguilhem


Mots clés :

Secteur socio-éducatif, Savoirs, Savoir-faire

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