Les ressources mobilisées par les jeunes travailleurs sociaux
dans les situations professionnelles à leur entrée dans le métier
Année : 2014
Thème : Approche comparée avec le métier d’infirmier
Type : Recherche : orientée vers la pratique, action, évaluative...
Auteur(s) :
CHAPUT Corinne (France) – corinne.chaputlebars@gmail.com
PIOT THIERRY (France) – thierry.piot@unicaen.fr
Résumé :
Peu de recherches se préoccupent des types de ressources que mobilisent les jeunes diplômés pour faire face aux nouvelles situations professionnelles. S’agit-il plutôt de savoirs théoriques, de savoirs techniques issus notamment des stages, de savoirs dispensés pendant la formation au travail social ou issus de modèles familiaux ou d’expériences antérieures ? Comment, dans un contexte d’ « universitarisation » des formations au travail social et de réformes des diplômes, de jeunes professionnels évaluent-ils le dispositif de formation ? Et faut-il l’ajuster ?
Nous avons partagé ces questions avec plusieurs laboratoires de Sciences de l’Education qui poursuivaient la même enquête en direction des jeunes enseignants et surtout en direction d’un autre métier de l’interaction humaine, dont l’ « universitarisation » est plus avancée : celui d’infirmier.
Nous avons conduit 12 entretiens avec 3 assistants de service social et 3 éducateurs spécialisés diplômés en 2010. Le premier entretien, de type biographique, permettait d’aborder les origines familiales et sociales du professionnel, et son parcours avant et après la formation au travail social. Le second était un entretien d’explicitation permettant de décortiquer l’activité professionnelle et de repérer les types de savoirs mobilisés, et le « style professionnel » développé, pour y satisfaire au mieux.
Les résultats principaux montrent que des ressources plurielles s’articulent de manière complexe :
-les stages sont plébiscités
-les types de savoirs appréciés en centre de formation sont ceux qui font la synthèse entre ressources théoriques et pratiques (Analyse de pratiques, accompagnement à la formation par alternance, travaux de groupe…)
-les jeunes professionnels construisent leur identité professionnelle par adhésion à des modèles (formateurs ou de pairs) ou par opposition à des contre-modèles (l’université)
-ils s’appuient souvent sur des valeurs familiales et des expériences antérieures, et notamment dans le champ de l’animation, mais regrettent que les trajectoires singulières ne soient pas suffisamment exploitées
-ils apprécient toutefois la part de liberté accordée par le centre de formation pour prendre des initiatives et développer un parcours personnalisé
-des différences apparaissent en outre entre éducateurs spécialisés et assistants de service social, les premiers valorisant la connaissance des publics, les seconds mettant l’accent sur la la déontologie et la méthodologie de l’intervention.
Une enquête analogue s’est intéressée aux infirmiers diplômés. Comme pour la plupart des formations concernant des métiers adressés à autrui, celle en soins infirmiers a été « réingeniérisée » : c’est une formation par alternance finalisée par un référentiel de compétences. Les ressources mobilisées de manière préférentielle pour faire face aux épreuves induites par l’entrée dans le métier (logique de construction identitaire et d’acculturation professionnelle) et pour être efficaces dans la prise en charge des situations professionnelles, notamment les plus critiques (logique de construction de compétences professionnelles avérées) apparaissent plurielles et hétérogènes et en interaction : de leur formation initiale, ils sélectionnent certains savoirs académiques liés aux soins et services hospitaliers où ils exercent, des gestes techniques et des protocoles de prise en charge ainsi que des situations emblématiques rencontrées en stage. Un élément apparaît dans les discours recueillis : la capacité à analyser cliniquement une situation de soin, à en inférer les éléments génériques et les éléments singuliers pour les relier dans une compréhension globale de cette situation. Cette capacité stratégique a pour effet de développer le pouvoir d’agir professionnel et il est d’autant plus important que les collectifs de travail auxquels appartiennent les jeunes diplômés offrent un accompagnement personnel et professionnel, à la fois empathique et exigeant.
Mots clés :
Savoirs, Professionnalisation, Insertion
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