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Participer à une recherche action : une démarche qui questionne les pratiques

Année : 2014

Thème : Faire « un pas de côté », ne plus se positionner en expert « sachant », mais aller à la rencontre des « signaux faibles », reconnaître les formes du pouvoir d'agir et ainsi passer de la compétence professionnelle à l'intelligence collective avec le territoire.

Type : Analyse d'expérience : d'intervention, de formation, de recherche...

Auteur(s) :

MARECAUX Claire (France) – c.marecaux@ites-formation.com

Résumé :

En 2011, 6 associations médico-sociales et/ou sociales bretonnes se sont engagées dans une action commune de formation innovante. Partant du postulat que, pour construire des politiques concrètes et durables, les décideurs politiques doivent s’appuyer sur des microréalisations locales enracinées dans des situations personnelles de vie et de solidarité informelle de la collectivité proche, elles ont décidé la mise en place de Recherches Actions Qualifiantes (RAQ). Ce projet avait pour finalité une évolution des pratiques d’intervention dans des domaines d’action porteurs de nouveaux défis et de nouveaux potentiels d’action. La première RAQ, « Accompagnement de personnes handicapées vieillissantes : une approche par le territoire », s'est déroulée de décembre 2011 à décembre 2013.
Formation innovante, avant tout collaborative, elle a eu pour objectif d'amener des professionnels à sortir de l’expertise individuelle pour s'ouvrir à l’action collective. 19 salariés, issus des 6 associations, se sont engagés dans cette aventure. Professionnels du soin (infirmier, aide-soignant), de l'accompagnement (aide-médico-psychologique, éducateur, moniteur-éducateur, assistant de service social) ou de l'animation (animateur), leur projet était d’identifier les expérimentations locales portées par les acteurs de la société civile dans un territoire donné, comprendre comment les réseaux de solidarité se construisent et interagissent, cerner les mécanismes permettant d’élaborer les réponses les plus larges/ouvertes possibles. La RAQ visant à saisir des « faire ensemble » entre des professionnels de l’intervention sociale et des habitants dans leur espace de vie, les stagiaires ont été répartis sur 3 territoires, aux caractéristiques bien différentes. Il s'agissait, tout d'abord, de repérer les acteurs et les ressources de chaque territoire en identifiant notamment les initiatives disponibles et mobilisables. Puis, en décrivant les dynamiques observées, chaque groupe a pu analyser des situations et le renforcement ou la création de nouvelles modalités d’intervention en se mettant à l’écoute des «signaux faibles ». C'est alors que les pratiques professionnelles ont été interrogées afin de ne pas se positionner en expert « sachant ». Car c'est en allant à la rencontre de ces signaux faibles présents sur le territoire qui, repérés par les acteurs des territoires, sont sources d’innovations porteuses de transformations locales, qu'il a pu être possible, en fin de formation, de créer un espace d’échanges et de dialogue favorable à la prise de décision, renforçant ainsi la capacité collective à agir.

Au travers de cette recherche, nous avons été amenées à porter un regard différent sur notre travail et surtout réapprendre à entendre les paroles des habitants d’un territoire : prendre le temps, lâcher prise, écouter. La co-construction dans l’élaboration commune d’un projet a fait appel à des apprentissages négociés de partage, de réflexion, de concertation, d’intelligence, qui donnent sens au faire ensemble. L’esprit RAQ a réellement pris forme, sans que nous ne nous en rendions compte au moment où, enfin, nous avons lâché prise, quand nous n’attendions plus rien de défini, et n’avions plus l’objectif d’agir. C'est lorsque nous n'avons plus été dans le faire, mais que nous avons accepté d'être dans le ressenti, dans l’infime, que nous avons enfin pu repérer « les signaux faibles ». Ces signaux qui existent, font vivre un territoire, font que les problématiques diverses d’une commune sont prises en compte sans que les institutions n’aient encore à intervenir. Il nous a fallu accepter de ne pas savoir, de ne pas avoir de réponse mais reconnaître à l'autre, à l'habitant un savoir. C'était faire ce « pas de côté » qui permet de changer notre regard et notre posture face à l’autre, et qui conduit à développer le « pouvoir d’agir », à chercher à révéler le potentiel de chacun.

Mots clés :

Recherche-action, Intelligence collective, Acteurs, Territoire

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