Violences au sein du couple : enjeux actuels et défis de demain

Année : 2014

Thème : Analyse d'expérience : d'intervention, de formation, de recherche...

Type : Analyse d'expérience : d'intervention, de formation, de recherche...

Auteur(s) :

WUTHRICH Angélique (Suisse) – angelique.wuthrich@hevs.ch

Résumé :

La communication que je propose est issue des réflexions menées dans le cadre de mon travail de Master en travail social. Par les questions qu’elle pose, elle s’inscrit dans l’axe 1.

Dans un contexte économique et socio-politique en mouvance, le travail social se doit de questionner ses logiques et pratiques pour ne pas perdre de vue ses valeurs fondamentales. A cet égard, l’intervention face aux violences conjugales n’échappe pas à cette remise en cause. En effet, si les revendications féministes des années 1970 et 1980 ont permis une politisation de cette problématique en dépassant les frontières du privé et du public, de l’individuel et du collectif, la réalité d’aujourd’hui est que la politisation de cette question est mise à l’épreuve. Les politiques sociales visent la responsabilisation et l’autonomie, et l’ancrage collectif du travail social se voit bousculé par un processus d’individualisation des politiques sociales et des pratiques. L’intervention tend désormais vers une forme d’accompagnement soutenant l’idée qu’il est possible de résoudre des problèmes sociaux par la transformation de l’individu.

Ce nouveau paradigme impacte certainement les pratiques professionnelles face à la violence au sein du couple. Ce phénomène complexe implique que les professionnel•le•s considèrent la problématique sous de multiples aspects. Or, les récentes injonctions à l’autonomie et à la responsabilisation ont pour conséquences notamment d’éluder la double dimension individuelle et socio-culturelle caractéristique des violences au sein du couple. Et ce alors que toute la particularité des pratiques face à la violence conjugale réside dans la difficile mais au combien nécessaire combinaison de ces deux dimensions. Cela donne naissance à une intervention qui dissocie l’angle individuel et collectif, ainsi qu’à des pratiques qui ne favorisent que peu l’intégration d’éléments de réflexion encourageant les personnes concernées à se situer comme faisant partie d’un rapport de pouvoir et de domination. De ce fait, par défaut d’intégration d’aspects liés aux rapports sociaux de sexe, l’action professionnelle peut conduire à une victimisation secondaire et à un renforcement des inégalités de genre. De plus, en éludant l’aspect du collectif et celui des rapports de pouvoir, les professionnel•le•s peinent à envisager la violence au sein du couple comme un continuum : ainsi diverses ressources sont mobilisées dans l’ici et le maintenant, dans le but de répondre aux prescriptions des politiques sociales, à savoir l’autonomisation de la personne aidée. La prise en charge s’étend sur un court ou moyen terme mais les conséquences psychologiques, sociales, professionnelles, financières notamment sont peu prises en charge par l’intervention. Ce qui à l’évidence représente un risque.

Au travers de cette communication je propose de débattre des risques que ces interventions sur « le court terme » font peser sur les bénéficiaires et sur le sens de l’action sociale. Je discuterai également de l’impact de ces injonctions à l’autonomie et à l’individualisation sur les pratiques dans le cadre spécifique des violences au sein du couple. Comment influent-elles sur la lecture de cette problématique et sur l’intervention ? Quelles sont les conséquences pour les personnes victimes ? L’intervention permet-elle de soutenir leur capacité d’agir et d’autodétermination ? De quel type d’autonomie parle-t-on ? Quels sont les défis pour l’intervention sociale ?

Mots clés :

Intervention sociale et travail social, Enjeux, Femmes

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