Promouvoir un positionnement d'acteur des usagers - un rôle potentiel pour les travailleurs sociaux dans le champ de l'aide à domicile
Année : 2014
Thème : Les leçons d'une recherche auprès de primo-demandeurs âgés
Type : Recherche : orientée vers la pratique, action, évaluative...
Auteur(s) :
HIRSCH DURRETT Elisabeth (Suisse) – ehirsch.wk@gmail.com
VOELIN Sabine (Suisse) – sabine.voelin@hesge.ch
Résumé :
La communication proposée se base sur une recherche conduite en 2011-2012 à Genève et Lausanne et financée par le Fonds National Suisse de la Recherche Scientifique et la Fondation Leenaards (subside 13DPD6_132282). Cette étude qualitative par entretiens menés en deux phases auprès d’une quarantaine de primo-demandeurs âgés d’aide et de soins à domicile se focalisait sur des figures de positionnement en tant qu’acteur face à l’intervention des services, cette première demande d'aide étant vue comme un marqueur de l’entrée dans un processus potentiel de perte d’indépendance. La population étudiée a été recrutée par le biais d’associations sociales ou de défense d’usagers, sans sollicitation des services d‘aide et de soins. Le collectif recruté témoigne de modes de vie urbaine et dessine des évolutions en termes de relations familiales et d’attentes envers les prestataires de services.
La recherche a mis en évidence des prestations focalisées sur les problèmes de santé et sur les incapacités. La réponse des services est structurée en termes de gestion, organisée par tâches mesurées et minutées et se décline par type de professionnel devant les accomplir. Pour les usagers, les conséquences de cette approche incluent, entre autres, un tournus élevé d’intervenants différents, une prise en compte restreinte non seulement des composantes relationnelles de la prestation mais également de la nécessité d’adapter les actions aux besoins individuels, notamment sociaux, des clients.
L’analyse des entretiens fait apparaître une gamme de stratégies déployées par les usagers face à un dispositif dont l’utilité est reconnue mais qui est perçu comme relativement rigide. A titre d’exemples, citons le recours à diverses combinaisons d’aide privée et d’intervention des services officiels, des tentatives visant à conserver la maîtrise sur sa vie quotidienne ainsi que sur le déroulement, le rythme et la nature de l’aide reçue, voire l’identification d’alliés pour relayer des désirs particuliers ou contourner des règles considérées comme trop rigides.
Plus largement, l’analyse démontre une prépondérance d’approches de type sanitaire dans un contexte d’abandon progressif par les services de prestations en matière d’activités instrumentales. Cette focalisation tend à amenuiser la marge de manœuvre des usagers, traités par les professionnels davantage comme des patients à domicile plutôt que comme des partenaires avec qui l’intervention doit être négociée.
Des approches plus aptes à promouvoir un positionnement d’acteur et à tenir compte des souhaits et attentes des usagers auraient un impact sur la qualité de vie, la prévention de la dépression et pourraient atténuer les sentiments d’inutilité. Elles pourraient ainsi influencer positivement le parcours de vie ultérieur de personnes âgées fragiles.
Ces résultats nous conduisent à préconiser un réexamen des politiques actuelles en la matière et à proposer une réflexion visant à mettre en place des actions d’information, d’advocacy et de soutien au choix de combinaisons d’interventions adaptées.
Les travailleurs sociaux, dont l’action professionnelle est fondée sur des valeurs de défense de l’autonomie, sont peu présents au sein des dispositifs et parfois confinés à des tâches d’obtention de prestations financières. Dans ce champ, on pourrait attendre d’eux qu’ils tentent d’agir en faveur de la liberté de choix des usagers, qu’ils défendent le droit à l’individualisation des aides offertes et qu’ils jouent le rôle de porte-paroles tant auprès des fournisseurs de prestations qu’auprès des autorités politiques.
De tels professionnels pourraient être intégrés au sein d’associations de défense d’usagers, dans le cadre de services sociaux polyvalents ou spécialisés, ou encore dans des structures offrant une information sociale large et ne se limitant pas à l’aiguillage dans le réseau. Ces pistes doivent faire l’objet d’un débat, auquel nous vous invitons.
Mots clés :
Autonomie, Acteurs, Le travail de care, Pouvoir d'agir
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