L'intervention sociale communautaire à l'épreuve du terrain

Année : 2014

Thème : Analyse d'expérience : d'intervention, de formation, de recherche...

Type : Analyse d'expérience : d'intervention, de formation, de recherche...

Auteur(s) :

PIECHOWICZ EMMANUELLE (France) – emmanuelle.piechowicz@gmail.com

Résumé :

L’intervention sociale communautaire est une forme d’action sociale collective dont l’appelation est peu retenue en France.
Les manuels de formation des travailleurs sociaux le mentionnent mais développent peu le concept, le resituant brevement dans un contexte socio-historique anglo-saxon.

L’intervention sociale communautaire suppose la mobilisation d’un collectif autour de problématiques communes sur un territoire. Elle implique pour le travailleur social un rôle de facilitateur, de médiateur entre les individus qui souhaitent s’impliquer et la société, elle suppose enfin un rôle d’expertise et de conseil (Bourque, 1997). Les compétences mobilisées font cependant partie du référentiel métier des travailleurs sociaux. Pourquoi alors ces derniers s’engagent-ils si peu dans cette forme d’action collective? Le travail social tel qu’il se pratique aujourd’hui est-il compatible avec la mise en projet d’action sociale communautaire ?

La notion d’empowerment est dans toute forme de travail social collectif, l’un des objectif principal (Bouquet,2000), et il est une condition siné qua non du travail social communautaire. La notion de communauté s’entend ici comme un ensemble de personnes qui peuvent se repérer et s’identifier et qui fonctionne sur des liens de solidarité (Maurel, 1978) ou partagent un vécu commun.

Afin de comprendre le manque de plébiscite de cette forme de travail social en France, nous confronterons l’analyse d’une situation de terrain avec les caractéristiques de l’approche centrée sur le développement du pouvoir d’agir de Le Bossé et co. (2002).
Nous nous focaliserons sur trois de ces caractéristiques que nous analyserons à travers l’exemple d’une action collective sur la prévention du décrochage scolaire menée en partenariat entre une association de quartier et un service de prévention.

La première caractéristique de l’action sociale communautaire est “l’affranchissement des obstacles individuels et structurels qui confinent à l’impuissance”. Comme le montrait Castel (1994), la perte de confiance dans leurs capacités d’agir poussent les personnes fragilisées dans des conduites stratégiques de “retrait social”. Nous poserons l’hypothèse d’un déplacement des formes d’intégration sociale citoyenne vers des formes d’expériences sociales consumméristes qui s’étendraient aux interactions entre populations et les services déconcentrés de l’état. Les parents attendent alors un service d’aide au devoirs de la commune et paient ce service.

Deuxième caractéristique : la négociation de la définition des problèmes sociaux. Cela suppose que dans une action sociale communautaire l’identification d’un problème et l’analyse de ses causes se déplacent de l’expertise des professionnels et décideurs politiques vers les savoirs profanes des habitants (Akrich, Rabeharisoa, 2012). L’enjeu de la définition du problème social est sous tendu par un ensemble de rapport de force entre des groupes sociaux : est-il liée à un problème d’adaptation individuel, ou bien est-elle structurelle et politique ?
Nous interrogerons la compatibilité des enjeux des acteurs en présence dans ce travail de construction du problème social. Le responsable de l’action se trouve alors à l’intersection des enjeux des politiques de la ville, des attentes des habitants, et de contraintes de sa structure dépendante financièrement du soutien des premiers, soutien conditionnés par la participation des seconds.

Troisième caractéristique : l’élargissement de la conscience des déterminants de l’action ou du statu quo. L’action sociale communataire vise le changement social. Il ne suffit donc pas que la participation des individu se résume à l’accomplissement d’un devoir citoyen (Donzelot, 2000) mais laisse entrevoir des possibilité de modification des cadres sociétaux. Comment les travailleurs sociaux peuvent-ils assumer cette position sans crainte de se sentir déstabilisés par les individus vis à vis des institutions dont ils sont dépendants ?


Mots clés :

Participation, Cohésion sociale locale, Association locale

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