ELIA Anna (Italie) – anna.elia@unical.it

En 2010, le Gouvernememt italien choisit une zone de la Calabre, dans le sud de l'Italie, pour réaliser un Programme de Resettlement (Réinstallation) destiné à une collectivité de réfugiés palestiniens provenant du camp de TANF entre la Syrie et l'Irak. Selon le statut du Haut Commissariat des Nations Unies aux Réfugiés (UNHCR), la réinstallation implique la “sélection” et le “transfert” des réfugiés du pays de premier asile vers un autre Etat ayant accepté de les admettre sur son propre territoire (UNHCR 2012). Le Programme qui s'avère être l'une des premières expériences de réinstallation réalisées en Italie, échoue après près d'un an suite à la fuite vers les pays scandinaves des membres de la communauté palestinienne réinstallée. Les médias nationaux et internationaux s'intéressèrent à la gestion du programme de réinstallation par le gouvernement italien, mais surtout aux problématiques de la zone choisie et à la responsabilité des acteurs locaux quant à l'échec d'un processus d'intégration durable. Une représentation qui met au second plan les processus multiniveau de la gouvernance des migrations forcées (Zetter 2009) qui conçoivent des stratégies de culpabilisation des acteurs sociaux locaux qui ne produisent pas de stratégies d'empowerment efficaces (Castel 2009) ou, plutôt, de limitation de la mobilité des réfugiés (Bauman, 2004). Nous nous attacherons, dans le cas examiné, aux effets de ces actes de déresponsabilisation sur le territoire, à partir de l'observation d'un microcosme socio-spatial dans lequel évoluent les protagonistes des nouvelles et des anciennes inégalités (Beck 2003). Au lieu de devenir un lieu de limitations pour les réfugiés, le territoire devient donc un espace dans lequel de nouvelles relations s'élaborent, outrepassant les catégories formées par les populations désavantagées et les sujets vulnérables. Ces processus renvoient aussi bien à un sentiment d'appartenance qu'à un acte d'appropriation de l'espace par des individus et des groupes sociaux (Krauss et Schmoll 2008). Une région défavorisée du sud de l'Italie comme celle observée ne doit pas nécessairement apparaître comme une terre de transit, mais comme un lieu où prennent forme des réseaux de relations qui laissent une marque tangible en dessinant de nouveaux parcours de participation (Cefaï 2012), entraînant des adaptations ou des mécanismes de détachement. - comme dans notre cas - qui permettent cependant de repenser les processus changeants d'inégalité sociale qui touchent les habitants et les réfugiés.
Les réflexions soulevées dérivent des récits des habitants et des réfugiés. La recherche empirique s'est déroulée entre 2010 et 2013 à travers des périodes d'observation participative et d'entretiens qualitatifs. L'analyse s'est inspirée de l'apport théorique d'une étude de Elias et Scotson de 1965 sur la communauté de Winston Parva. Une célèbre recherche ethnographique sur la vie en commun de groupes sociaux différents, qui s'attarde sur les différences entre les enracinés (une collectivité d'ouvriers déjà résidente sur le territoire) et les externes (ouvriers arrivés successivement). La recherche entendait mettre en relief la reproduction du sentiment d'appartenance aux lieux et les processus de reconstruction des network sociaux par les protagonistes des migrations forcées, lesquels, outrepassant la dimension ethnique, mettent en œuvre des pratiques afin de récupérer un capital social et politique, créant des opportunités quant à une identité territoriale partagée et nouvelle, articulée autour de la diversité en tant que valeur.


Axe 3: Réinventer l’intervention sociale communautaire pour recréer des liens sociaux
et développer la citoyenneté

Territorialisation, Société civile, Solidarité de proximité