Évaluer la qualité des maisons de retraite
Année : 2015
Thème : un point de départ pour repenser les pratiques du travail social
Type : Recherche : orientée vers la pratique, action, évaluative...
Auteur(s) :
ALVES Helder (Portugal) – helder.alves@isssp.pt
Résumé :
Notre objectif principal est de discuter les pratiques du travail social en maisons de retraite en prenant appui sur les informations recueillies au cours d’un processus d’évaluation d’un échantillon de ces institutions mené à Porto et dans sa région.
Le modèle d’analyse qui préside à la construction des instruments de recueil d’informations reconnaît l’influence du contexte spatial et organisationnel, ainsi que des ressources détenues par les professionnels et les résidents, sur le climat social des institutions et sur le vieillissement lui-même. Des résultats obtenus grâce à l’application des 8 instruments élaborés par Moos & Lemke (1994), nous privilégierons ici ceux qui ont trait aux dimensions organisationnelles, en les mettant en rapport avec les caractéristiques socioculturelles des résidents, leur état de santé et niveaux de dépendance. En 2004/05, 44 maisons de retraite furent observées. En 20212/13, 30 de celles-ci furent réévaluées. Cet exercice comparatif nous permet de vérifier les changements opérés au niveau des politiques organisationnelles et des pratiques des professionnels pour que les résidents ne soient pas privés du contrôle sur leur propre vie et puissent continuer à développer expectatives et projets, sans pour autant ignorer d’éventuelles altérations au niveau des caractéristiques socioculturelles des résidents et de leur état de santé.
L’une des conclusions qui ressort de “l’enquête sur les caractéristiques d’organisation et de fonctionnement” est que les opportunités de contrôle des résidents sur la vie quotidienne des institutions et sur la leur sont en recul (la valeur médiane déjà basse en 2004/05 – 20 – est passée à 16, en 2012/13). Cela met en doute que l’expansion de l’offre de services corresponde effectivement à une plus grande attention aux besoins et à la dignité des individus; et nous conduit à considérer que l’empowerment des résidents doit constituer un axe central de l’intervention sociale.
Une autre conclusion à retirer de “l’enquête relative aux caractéristiques du personnel et des résidents” se réfère au vieillissement prononcé de la population qui vit en maison de retraite (en 2004/05, 35,8% des résidents avaient 85 ans et plus; en 2012/13, ce taux est de 47,6%), à sa féminisation (les femmes représentaient 71,3% des résidents en 2004/05 et 72,2% en 2012/13) et à son niveau élevé de dépendance. Tous les indicateurs destinés à mesurer les niveaux de dépendance confirment leur accentuation entre les deux dates : c’est le cas des pourcentages de personnes âgées qui ont besoin d’être totalement aidées pour manger (de 19% à 28,2%) ; prendre leur bain (de 46,1% à 61,6%) ; marcher (de 28,5% à 40%); s’habiller et se déshabiller (de 35,6% à 46,2%); se coucher et se lever (de 34,3% à 51,3%); exprimer de façon claire leurs besoins et désirs (de 23,2% à 39,3%); aller faire des courses (de 52,1% à 69,5%); gérer leur argent (de 44,2% à 59,6%); prendre soin de leur apparence (de 32,1% à 48,4%); utiliser le téléphone (de 38,5% à 53%). La littérature indique qu’il est possible de prévenir, et même de contrarier, la détérioration de l’état de santé quand les résidents peuvent exercer leur contrôle sur la vie de la maison de retraite et sur leur propre vie. C’est, à notre sens, ce qui justifie que les travailleurs sociaux se compromettent à défendre les droits des résidents et à promouvoir des changements organisationnels en ce sens. Ils se doivent d’impliquer les résidents dans les décisions qui concernent leurs plans de soins et, quand des problèmes cognitifs les en empêchent, d’impliquer leurs parents ou autres proches, de manière à garantir que chaque personne puisse être comprise dans sa complexité et particularité, grâce au partage d’informations relatives à son histoire de vie, à ses valeurs et intérêts, et que ses réactions et conduites seront réellement déchiffrées, au lieu d’être systématiquement attribuées au vieillissement.
Mots clés :
Intervention sociale et travail social, Participation, Evaluation
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