Soutenir l’engagement existentiel et vocationnel des étudiants en travail social : une voie pour faire face à l’adversité et garder vivants les désirs de solidarité
Année : 2016
Thème : Présentation des résultats d’une recension des écrits scientifiques portant sur la pertinence de soutenir l’engagement existentiel et vocationnel des étudiants en travail social pendant leur formation initiale, effectuée dans le cadre de la réalisation d’une thèse de doctorat en service social.
Type : Recherche : orientée vers la pratique, action, évaluative...
Auteur(s) :
BEAUCHESNE Marie (Canada) – marie.beauchesne.2@ulaval.ca
Résumé :
Cette communication présentera les résultats d’une recension critique des écrits scientifiques portant sur la pertinence de soutenir l’engagement existentiel et vocationnel des étudiantes en travail social, au cours de leur formation initiale. Il appert que mettre en œuvre des moyens pédagogiques afin d’aider les étudiantes à formuler un projet existentiel porteur, au sein duquel elles auront pu apprivoiser leur aspirations et buts de même que leur rapport à leur expérience personnelle passée, pourrait leur permettre de consolider leur désir de solidarité de même que les aider à faire face à l’inévitable adversité qui marquera leur parcours professionnel.
Chaque année au Québec près de 7000 personnes postulent pour accéder aux programmes universitaires de formation en travail social qui n’ont que quelques 850 places à offrir. Cette profession jouit d’une grande popularité, malgré certaines contraintes qui lui sont rattachées, notamment la pression d’intervenir au service du maintien du lien social dans un contexte de plus en plus précaire, complexe et incertain (Boily, 2014; Larivière, 2013). Il semble que ce soit entre autres les valeurs reliées à la profession, axées sur la justice sociale et l’empowerment des populations marginalisées, de même que le désir d’aider les autres et de rendre le monde meilleur, qui soient à l’origine de l’engagement en travail social, pour beaucoup d’étudiants (Buchbinder, 2007; Sellers & Hunter, 2005; Warde, 2009). Toutefois, cet engagement initial est fortement à risque d’être désenchanté face aux nombreuses contradictions ou difficultés qui attendent les travailleurs sociaux sur le terrain. La confrontation quotidienne à la vulnérabilité et à la souffrance humaine, couplée à des ressources de plus en plus limitées pour intervenir, provoquent un écart douloureux pouvant conduire à l’épuisement des travailleurs sociaux (Biron, 2006; Boily, 2014). D’ailleurs, ceux-ci seraient plus à risques que d’autres professionnels de la santé d’abandonner la profession prématurément (Boily, 2014).
En outre, la nature réciproque du lien avec les usagers forcerait le travailleur social à réévaluer fréquemment ses valeurs, à reconsidérer son histoire et à transformer certains éléments de son identité personnelle, que ce soit son identité de genre, sa vision des relations amoureuses, son histoire familiale ou son rôle de parent (Bailey, Buchbinder, & Eisikovits, 2011; Goldblatt & Buchbinder, 2003; Menashe, Possick, & Buchbinder, 2014). Cet aspect de la relation comporterait des risques pour le travailleur social, précisément s’il n’a pas eu l’occasion d’examiner son vécu préalablement ni de se préparer à être profondément bouleversé par son travail. D’autant que les étudiants en travail social sont plus susceptibles d’avoir vécu des traumatismes et des problèmes psychosociaux que les étudiants d’autres disciplines (Buchbinder, 2007; Sellers & Hunter, 2005; Warde, 2009). Par ailleurs, cette réciprocité relationnelle peut être une source de développement pour les travailleurs sociaux, pour peu qu’ils soient outillés afin de transformer leur expérience d’inconfort en occasion de croissance (Hernández, Engstrom, & Gangsei, 2010; Tehrani, 2007).
Le corpus d’études consulté portait notamment sur l’expérience vécue des travailleurs sociaux au contact du vécu des usagers, et présentait des considérations concernant la formation des étudiants. Ces études suggèrent qu’il est impératif d’aider les étudiants à développer une meilleure connaissance et conscience de soi et à intégrer leurs expériences passées ainsi que leur désir d’aider les autres, en un projet d’engagement existentiel cohérent et porteur. Ce projet pourrait les aider à se prémunir contre l’épuisement professionnel et à faire face à l’adversité inhérente à leur fonction. Nous présenterons une synthèse des recommandations issues de ces recherches et réfléchirons à leur mise en application dans la formation initiale des travailleurs sociaux.
Mots clés :
Formation, Intervention sociale et travail social, Quête du sens
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