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De la conceptualisation du développement communautaire comme objet de formation des étudiants en travail social

Année : 2016

Thème : En quoi la quotidienneté in situ vient-elle bousculer nos savoirs agissants ?

Type : Analyse d'expérience : d'intervention, de formation, de recherche...

Auteur(s) :

MARIALE Line (France) – linemariale@gmail.com
Mechaheb Dalila (France) – dalila.mechaheb@gmail.com

Résumé :

De la rencontre à la transmission des solidarités : une association-une filière de formation en travail social
L'association Tinmel pour le développement est une O.N.G locale qui œuvre depuis 2003 au développement social et durable du territoire dans la région de Talat-n-yacoub dans le Haut-Atlas au Maroc. Parmi les actions menées on peut compter : le réseau de distribution d’eau potable, l’accès à la scolarisation (transport, activités périscolaires...).
L’IRTS Paris IDF compte parmi les filières de formation initiale, les conseillers en économie sociale et familiale : CESF. Ces professionnels ont pour cœur de métier l’intervention dans le cadre de la vie quotidienne (avec comme outil notamment l’analyse du rapport à l’argent). Les étudiants inscrits dans cette filière, titulaires d’un BTS en économie sociale et familiale suivent leur formation en travail social durant une année. Nous pouvons compter parmi eux, une majorité de jeunes femmes (peu d’hommes choisissent cette orientation) de 19 à 22 ans sortant du BTS et depuis près de 5 ans, on observe également un profil de personnes plus âgées allant au-delà de 50 ans.
Le référentiel de formation des CESF prévoit 20h de formation « Langue vivante étrangère ». Le postulat des formatrices de la filière présente 3 objectifs pédagogiques :
-Donner un sens professionnalisant à ces 20h de formation
-Positionner les étudiants dans une démarche de projet
-Rencontrer l’autre sur son territoire (se déplacer de nos cadres de références, comprendre celui de l’autre pour communiquer, agir et travailler ensemble).
La thématique LVE retenue en 2016 est la rencontre avec les membres de l’association durant 4 jours.

Innovation de pratique de formation : la démarche interculturelle « hors les murs » à deux niveaux : la rencontre de l’autre dans son pays et « quand nos savoirs sont intervention pour l’autre »
Nous sommes parties valises en mains chargées de concepts et d’outils méthodologiques en travail social, convaincues et enthousiastes à l'idée de pouvoir transmettre des pratiques pédagogiques occidentales basées sur les principes fondateurs de la relation d'aide. Comme si, sans l’avoir nommée, nous avions dans l'idée que nos savoirs occidentaux « éclairés », issus d’un rapport au savoir fort seraient une évidence à acquérir pour une population annoncée comme non formée (au sens universitaire). Comme si, plus précisément, et de manière à priori, la « logique du logos» ne pouvait que s’inscrire dans une démarche descendante vers ce territoire, cette association, par ses adhérents en présence, avec pour nous, une attitude quasiment introjectée de nos habitudes occidentales de celles dotées du supposé savoir devant rencontrer des personnes qui œuvrent à leurs pratiques transmises de génération en génération.
Or nous avons été fortement bousculées dans nos représentations et pratiques interventionnistes puisque nous avons pu observer des femmes inscrites dans un savoir relationnel au-delà de la barrière de la langue (qui nous limitaient, nous et non elles). En effet, ce sont des femmes entrepreneures et prenant part active au développement de leur territoire qui nous ont formées, à la façon de la transmission intergénérationnelle de leurs pratiques par ce « vécu de l’activité » nous mettant au « travail sur leur expérience ». A leur corps défendant, par leur savoir agissant et leur capacité congruente, elles ont démontré que les savoirs acquis ne constituent pas exclusivement le socle fondateur d’un développement économique, durable et social d’un territoire.
Après cette expérimentation d'une démarche de développement communautaire et interculturelle inscrite dans une volonté de démocratie participative, nous posons le postulat suivant :

Pour une conceptualisation d’une pédagogie des « solidarités en question et actes » :
La quotidienneté au sens qu'elle fait société permet à des habitants de créer des forces collectives, de développer des compétences économiques, sociales, culturelles, de donner une place et fonction à chacun d'entre eux et donc de s'inscrire dans un mouvement systémique sans formation théorique préalable (ou de manière marginale). Il s'agit, dès lors, de qualifier cette formation-action comme un processus d'auto empowerment où le groupe se donne le pouvoir du fait même d'une gestion de la quotidienneté collectivement nécessaire.
Cette expérience, formative pour nous, nous amène à nous décentrer de notre rapport au savoir et de son pendant « agir », trop souvent engagés dans une dichotomie voire un clivage du côté occidental pour l’envisager dans une dialectique de l’intervention et du développement communautaire.

Mots clés :

Formation, Interculturel, Développement local, Empowerment

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