GILLET François (Belgique) – fgillet@heb.be

Il y a dix ans, dans une Maison de quartier d’une métropole européenne, l’équipe « logement » mesure l’énergie folle que mettent des personnes et des familles dans la précarité pour survivre dans leur habitat. Les appartements souvent insalubres et très énergivores les empêchent de sortir du cercle vicieux de leur mal-logement. Un projet est dès lors mis en place pour sensibiliser une vingtaine de familles dans la précarité au concept de «bâtiment passif » ou « bâtiment basse-énergie». Parallèlement, une réflexion est menée avec ces familles pour leur faire prendre conscience qu’en unissant ensemble leurs efforts à ceux de la municipalité, elles pourraient contribuer à construire à moindre frais un habitat passif partagé susceptible d’accueillir confortablement une vingtaine de familles. La municipalité peut ici jouer un rôle de type « Community land trust » en offrant le terrain à la copropriété pour un euro symbolique. La période de réflexion, concertation, réalisation des plans, dans un mode remarquablement participatif, a pris deux années. Le chantier de construction du bâtiment a duré une année et demi et l’aménagement intérieur par les habitants encore quelques mois. Depuis six ans environ, ces 20 familles habitent leur logement et en sont propriétaires. L’équipe de la maison de quartier peut maintenant avec un peu de recul examiner les bénéfices de l’opération et en tirer les leçons pour d’autres projets actuellement en cours d’élaboration.

Voilà un exemple parmi d’autres des projets suivis et analysés par le projet européen de recherche LearnBi0n. Son intérêt est de mesurer comment en plus des paramètres architecturaux, technologiques et économiques de ce type de projet, les dimensions sociales, éducatives, participatives et humaines vont apparaître comme des conditions incontournables de leur réussite.

Le projet de recherche de trois ans (2016-2018) financé par le programme Erasmus+ croise des expériences espagnoles, portugaises, françaises, anglaises, belges, italiennes et suédoises. Au cours de sa première année, le travail a principalement consisté à recenser des expériences existantes et à les analyser en mettant en perspective tous ces paramètres. Sont principalement impliqués dans le projets, des architectes, designers, ingénieurs, travailleurs sociaux, éducateurs spécialisés, habitants, collectifs d’habitants, et conseillers en logement.

Un défi de ce projet pour les deux années qui suivent est d’organiser ou d’accompagner des chantiers en vue de tester différents matériaux de construction permettant un meilleur rapport participation des habitants / qualité de vie / résultat énergétique. En effet certains matériaux sont facilement appropriables par les habitants, leur permettent de s’impliquer un maximum dans l’auto-construction et donc de réduire encore le coût du chantier. Ils permettent en outre de penser l’ entretien dans la durée du bâtiment. Construire avec des blocs de terre compressée, construire en ossature bois ou avec du bois cordé, construire avec de la paille/terre ou avec du pisé, voire du bambou, voilà quelques chantiers programmés dans les différents pays partenaires du projet. L’objectif principal en est de comprendre l’interaction entre dynamiques des techniques de construction et dynamiques sociales, éducatives et participatives.

Les résultats de ces chantiers de recherche-action collaborative et de leur analyse mèneront à l’édition de guides permettant aux futurs collectifs d’habitants candidats à la construction de choisir, -un peu partout en Europe- leur matériaux et leur modes de participation dans les chantiers en fonction de leurs réalités propres et des réalités économiques et écologiques de leur futur lieu de vie.

Solidarité, Habitat durable, Participation