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CSUPOR Isabelle (Suisse) – isabelle.csupor@hetsl.ch
AUBRY Roxane (Suisse) – roxane_aubry@yahoo.fr
MERCOLLI Mauro (Suisse) – mauro.mercolli@eesp.ch

Accompagner les sorties de prostitution aujourd’hui relève d’un défi qui interroge les solidarités publiques et les politiques sociales. La présente communication s'inscrit dans l'axe 2 (les expérimentations et la mise en oeuvre des solidarités aujourd'hui). Elle vise à rendre compte et à questionner les pratiques professionnelles et les méthodologies d’intervention qui allient accompagnement individuel et collectif au sein de la consultation sociale de l’association SOS Femmes à Genève. Celle-ci, unique en Suisse romande, a pour mission principale la réinsertion socioprofessionnelle des femmes en difficultés sociales ou économiques, et plus spécifiquement celles des femmes – ou, très exceptionnellement des hommes – qui souhaitent quitter le travail du sexe et réorienter leur existence vers d’autres horizons.

En premier lieu, cette communication montrera comment l’intervention sociale auprès des (ex-)travailleuses du sexe doit avant tout prendre la mesure de la construction sociohistorique de la prostitution en montrant comment celle-ci a notamment divisé les différents courants féministes selon qu’ils considèrent la prostitution sous l’angle de l’exploitation ou sous l’angle de l’émancipation (Dorlin, 2003 ; Lieber & al. 2011 ; Mathieu, 2013 ; Pheterson, 2001 ; Tabet, 2004). Elle rendra aussi compte des politiques publiques en matière de prostitution (Chimienti, 2009). A Genève, celle-ci est inscrite dans une politique publique de type réglementariste, qui considère la prostitution comme une « activité lucrative licite » dans la mesure où celle-ci est exercée de manière indépendante, la Loi cantonale sur la prostitution a pour buts de garantir l’exercice légal de l’activité, de mettre en œuvre des mesures de prévention, de promotion de la santé et de réorientation professionnelle et de réglementer l’exercice de la profession (Cour des Comptes, 2014)

En second lieu, nous montrerons dans quelle mesure, la dichotomie entre aliénation et liberté individuelle est infondée pour accompagner les personnes concernées dans leur réinsertion socioprofessionnelle et qu’il est préférable, pour les professionnelles d’adopter une posture « médiane » qui permet de rendre compte de la diversité des situations, entre choix individuel et contraintes ou exploitation, en tenant compte de l’intersectionnalité des rapport de pouvoir (de genre, de « race » ou d’origine sociale) qui produisent violence symbolique, stigmatisation, et discrimination (Aubry, 2014), se déployant ainsi dans une zone de vulnérabilité sociale.

En troisième lieu, cette communication montrera comment les processus de réinsertion sociale et professionnelle des (ex-)travailleuses du sexe se construisent en prenant appui sur les politiques sociales et plus particulièrement sur les dispositifs de l’aide sociale, de l’assurance invalidité les soumettant alors aux exigences d’activation propres aux politiques d’insertion de l’Etat social actif, en mettant en évidence les tensions qui en résultent dans les processus de construction identitaire et professionnelle (Csupor, 2011 ; Herman, 2011 ; Ossipow, Lambelet & Csupor, 2008).

Enfin, nous discuterons des méthodes et outils d’intervention sociale développés au sein de l’association SOS Femmes, et nous verrons comment ceux-ci s’inscrivent dans une complexité qui s’appuie sur la capacité des intervenantes à conscientiser les consultantes à leurs capabilités contextualisées (Bonvin & Favarque, 2008), puis à renforcer et enrichir leurs ressources ontologiques, personnelles, sociales et professionnelle (Soulet & Châtel, 2003).

Intervention sociale et travail social, Insertion, Méthodologie, prostitution