La solidarité dans l’investissement: le déploiement de la finance sociale dans la lutte contre la pauvreté

Année : 2016

Thème : Forum, GT, Carrefour

Type : Forum, GT, Carrefour

Auteur(s) :

GAUDREAU LOUIS (Canada) – gaudreau.louis@uqam.ca
BERTHIAUME ANNABELLE (Canada) – annabelle.berthiaume@mail.mcgill.ca

Résumé :

Depuis le milieu des années 1990, le discours entrepreneurial de l’investissement social prend de l’importance dans les stratégies d’action publique de lutte contre la pauvreté (Frumkin, 2003). Ces changements s’accélèrent depuis la crise de 2008 marquant ainsi le point de départ d’une “révolution” dans le monde philanthropique (Salamon, 2014). Celle-ci se caractérise par l’augmentation et la diversification des acteurs économiques intervenant dans le domaine social ainsi que par la diffusion d’une approche entrepreneuriale du soutien à l’intervention sociale qui accorde une importance nouvelle aux retombées (quantifiables de préférence) de ce dernier. L’expression “finance sociale” désigne la diversité des pratiques qui ont en commun d’engager un capital dans dans le domaine social afin de générer un rendement à la fois économique et social. Elle regroupe aussi bien des acteurs aux pratiques typiquement financières, telles que le micro-crédit, le crédit communautaire ou l’émission d’obligations à impact social, que des intervenants s’appuyant sur des formes “hybrides” d’action (entrepreneuriat social, économie sociale et philanthropie stratégique).
Confrontés à des difficultés financières chroniques, les organismes associatifs et communautaires sont nombreux à se tourner vers ces nouvelles pratiques. Celles-ci se présentent comme une alternative à la précarité et comme une manière d’assurer la pérennité de l’intervention: l’investissement solidaire comme réponse à la pauvreté.
En raison de la pluralité des pratiques et des acteurs qui lui sont associés, la finance sociale ne fait cependant pas l'unanimité.
Certains défendent par exemple l’importance d’orienter la finance et les acteurs économiques vers des projets “socialement responsables”. Souvent issus du mouvement syndical, plusieurs acteurs de la finance sociale la conçoivent comme une manière d’intervenir à un autre niveau et d’auto-financer les projets dont ils souhaitent la réalisation. La finance sociale aurait ainsi l’avantage de “faire du capital un outil au service du travail” (Bourque, Simard, 2004). À plus petite échelle, certaines formes de finance sociale, comme le crédit communautaire, le prêt solidaire et les plateformes de financement (crowfunding), favorisent également les projets misant sur la participation des communautés. La finance sociale permettrait donc de rendre les groupes et associations communautaires plus autonomes de l’État et de leur bailleurs de fonds traditionnels.
Le développement de la finance sociale dans les milieux associatif et communautaire suscite aussi des inquiétudes. Comment la recherche de “profit” financier est-elle conciliable avec les formes de solidarités imaginées par l’action communautaire ? En particulier, on se demande comment un financement associé à une exigence de remboursement peut-elle s’arrimer à des formes d’intervention dont le rendement financier immédiat est difficilement envisageable, comme l’intervention en centre de jour, la défense des droits ou l’éducation populaire (Harnois, Greason, 2016) ? Plus encore, certaines expériences de ce type aux États-Unis (D.Cohen, Zelnick, 2015) et en Ontario (R.Cohen, 2014) se sont avérées peu probantes.
Néanmoins, comme nous l’observons au Canada (RHDCC, 2013) et en France (Gachet, Le Pendeven, Lucas, 2016), plusieurs acteurs publics et privés s’intéressent aux outils de la finance sociale pour renouveler les pratiques de financement de l’action sociale. Dans ce forum, nous proposons d’ouvrir un espace de discussion sur la finance et la solidarité sociales, particulièrement dans le secteur communautaire (ou associatif). Le forum aura pour objectif :
- de partager des connaissances sur les outils et principes de la finance sociale.
- d’ouvrir un espace de réflexion sur les enjeux et potentialités du recours à la finance sociale dans les groupes associatifs.

Mots clés :

Logique marchande, Action communautaire, Autonomie

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