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Les « recherches citoyennes » : un levier pour la solidarité

Année : 2016

Thème : Analyse d'expérience : d'intervention, de formation, de recherche...

Type : Analyse d'expérience : d'intervention, de formation, de recherche...

Auteur(s) :

JAEGER Marcel (France) – marcel.jaeger2@orange.fr

Résumé :

Dans son rapport remis en 2015, Refonder le rapport aux personnes - « Merci de ne plus nous rappeler usagers », le conseil supérieur du travail social a donné une place décisive à la participation des personnes accompagnées aux actions qui les concernent, y compris en matière de recherche. Une de ses préconisations a été : « Impulser des travaux de recherche collaborative, au-delà de la recherche-action n’impliquant que les professionnels de la recherche et du travail social ». Pour ce conseil et maintenant pour le Haut conseil en travail social, la recherche permet une meilleure intelligence « de l'agir » ; elle est indispensable pour envisager l’avenir, anticiper, innover…, faute de quoi les convictions, les certitudes l'emportent sur les connaissances et empêchent de sortir de la répétition des discours et des pratiques. Elle permet surtout, en associant les personnes accompagnées en raison de leurs difficultés, d'aider à passer, selon la formule Michel Dinet et Michel Thierry, de la solidarité par les droits à une « solidarité d’engagement ».

Cependant, la reconnaissance de la possibilité pour des personnes vulnérables non seulement d'être associées à des recherches, mais aussi à en produire elles-mêmes se heurte, tout particulièrement en France, à une conception restrictive du savoir scientifique et aux rigidités de cultures professionnelles. Or, les contributions d'acteurs très différents peuvent amener les chercheurs à se décentrer de leurs références habituelles, tandis que, de leur côté, les « usagers/ères » sont susceptibles de sortir d’un positionnement contraint de « bénéficiaires » passifs. De nombreux travaux évoquent des collaborations utiles à la fois aux « usagers/ères » et aux chercheurs, même si la notion de « recherche usagère » suggère une certaine dissymétrie dans ce qui peut passer pour une confrontation entre deux sources de légitimité. Ce point a été travaillé, notamment au Conservatoire national des arts et métiers, dans le cadre d'un séminaire sur l’épistémologie des démarches participatives et en croisement des savoirs avec des personnes en situation de pauvreté. Initiée par le Mouvement ATD (Agir Tous pour la Dignité)-Quart Monde, la démarche de croisement des savoirs avec des personnes en situation de pauvreté repose sur un a priori éthique et épistémologique : toute personne, même la plus démunie, détient potentiellement les moyens de produire un savoir utile aux chercheurs professionnels.

L'idée n'est pas très éloignée de la thématique des « sciences participatives » et des « sciences citoyennes ». Un rapport de deux chercheurs de l'INRA, François Houllier et Jean-Baptiste Merilhou-Goudard (2016), évoque les « sciences participatives, à savoir des formes de production de connaissances scientifiques auxquelles des acteurs non-scientifiques-professionnels — qu’il s’agisse d’individus ou de groupes — participent de façon active et délibérée ». Cela inclut, poursuivent-ils, « tout dispositif de recherche dans lequel des acteurs de la société civile participent au processus de production scientifique ». Pour le moment, l'expression « science citoyenne » concerne surtout la recherche sur l'environnement, le numérique et, plus récemment, les sciences sociales (Alliance Athena) et les sciences de la vie et de la santé (Alliance Aviesan). Il reste à préciser les apports possibles pour le travail social et l'intervention sociale.

Mots clés :

Recherche-action, Citoyenneté, Participation

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