POIREL Marie-Laurence (Canada) – marie-laurence.poirel@umontreal.ca

Dans une étude exploratoire récente, nous nous sommes intéressées aux effets du contexte actuel de gestion managériale, de rationalisation et de compression des dépenses dans le réseau public de la santé et des services sociaux au Québec, particulièrement depuis les dernières réformes, sur les conditions de la pratique du travail social. Nous nous préoccupions en particulier des stratégies mises en place par les travailleuses pour faire face à ce contexte.

Nous avons rencontré dans le cadre d’entretiens semi-dirigés une douzaine de travailleuses sociales provenant de dix équipes à vocations diverses de différents établissements publics de la région de Montréal. Les intervenantes ont participé à la recherche à titre personnel. C’est à partir d’un certain idéal de la pratique du travail social que les intervenantes nous ont parlé des conditions actuelles de la pratique dans les services publics. Leurs témoignages évoquent un profond écart entre une pratique porteuse de sens et un système qui produit du non-sens. À partir de milieux et d’expériences diverses, les témoignages se rejoignent et se font écho, nous parlent d’un même phénomène à partir de différents angles, contribuant à mieux en mettre en lumière les dynamiques et les enjeux.

À cet égard, les résultats préliminaires de cette étude qualitative indiquent que les dernières réformes semblent être venues accentuer voire radicaliser les écueils souvent dénoncés de la nouvelle gestion publique, et plus largement de l’idéologie néolibérale, dans le monde du travail : accélération, dé-subjectivation, compétition malsaine, isolement… En même temps, les pressions et l’adversité qui frappent les différents acteurs de la santé et des services sociaux pourraient venir toucher de manière toute particulière la pratique du travail social et certaines des valeurs centrales qui l’accompagnent et la guident. Par ailleurs, les résultats de notre étude mettent en évidence que, pour préserver le sens de leur pratique et la qualité du lien avec les personnes et les groupes auprès desquelles elles interviennent, les travailleuses sociales déploient différentes stratégies, tantôt qualifiées de survie, tantôt d’adaptation tantôt de résistance. Au-delà des mots qui sont utilisés par les participantes, la résistance apparaît bien présente, avec la particularité de rester surtout silencieuse. À cet égard, la solidarité se dessine en creux des valeurs qui semblent venir soutenir les stratégies et les pratiques de résistance. Quelles sont ces pratiques de résistance ? Quels en sont les effets du point de vue des travailleuses sociales? De quelle manière ces pratiques de résistance sont-elles inspirées et portées par un idéal et des pratiques de solidarité?
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Intervention sociale et travail social, Quête du sens, Solidarité