Remettre en question le système économique dominant : quand différents acteurs se rencontrent pour redéfinir les solidarités et reprendre du pouvoir
Année : 2017
Thème : Analyse d'expérience : d'intervention, de formation, de recherche...
Type : Analyse d'expérience : d'intervention, de formation, de recherche...
Auteur(s) :
LAURIN-DANSEREAU ÉMILIE (Canada) – emilie@acefnord.org
Résumé :
La démarche de pensée critique sur le système économique actuel, lancée en 2016, s’inscrit dans la mission de l’ACEF du Nord de Montréal qui est d’améliorer les conditions de vie des citoyens et d’augmenter leur esprit critique face à la société de consommation. Ce projet poursuit un objectif triple : mieux comprendre les causes de la pauvreté et de l’endettement, à partir du vécu des personnes qui en ont l’expérience; déconstruire le modèle économique actuel et identifier les changements souhaités; proposer des solutions et se mobiliser pour une société plus juste.
Les citoyens sont au cœur de cette démarche qui associe aussi des intervenants et des chercheurs. Nous partons du principe que les personnes en situation de pauvreté ou d’endettement sont les plus à même d’identifier les actions à mener. L’idée est de valoriser le savoir expérientiel de ces personnes afin de trouver des réponses en lien avec leur situation.
D’où nous est venue l’idée d’un tel projet? Depuis plusieurs années déjà, nous remarquons que l’endettement des personnes augmente et que les citoyens s’appauvrissent de plus en plus. Le discours dominant voulant que les personnes s’endettent parce qu’elles font de mauvais choix financiers est peu remis en question. Le courant de la « littéracie financière », très à la mode de nos jours, fait reposer l’endettement et l’appauvrissement de toute la société sur les individus. Pour nous, ce phénomène d’endettement est, au contraire, le résultat d’une logique systémique.
En effet, dans notre pratique, nous constatons que le recours à la carte de crédit est plutôt devenu un moyen de compenser un manque de revenu pour combler les besoins de base. Dans les dernières années, le taux d’endettement des Canadiens n’a fait qu’augmenter. Cette situation s’explique par le contexte social et économique. Le marché du travail se précarise, le coût de la vie augmente et les salaires ne suivent pas. La tarification des services publics et les coupures dans les programmes sociaux aggravent les choses. Résultat : on paie l’épicerie avec la carte de crédit. D’ailleurs, des études démontrent que les coupures dans les services et programmes sociaux ont comme effet de transférer la dette publique aux individus.
Devant ce retour de l’endettement de subsistance, il est très difficile de trouver des solutions budgétaires pour les ménages. Ainsi, confrontés aux limites de notre intervention, nous avons décidé de nous asseoir avec d’autres pour mieux comprendre cette situation et trouver des solutions collectives aux causes de l’endettement. Notre projet s’inscrit dans la vision d‘une communauté où la richesse est partagée collectivement et où l’action citoyenne est valorisée, vision chère à l’ACEF.
Pour ce projet qui s’étalera sur 3 ans, nous privilégions deux approches : l’éducation populaire autonome et le croisement des savoirs. Il s’agit ici de faire se rencontrer le savoir des personnes qui vivent en situation de pauvreté ou d’endettement, celui d’intervenants qui travaillent auprès de ces personnes et finalement, celui de chercheurs qui s’intéressent à ces enjeux. Le caractère innovant de la démarche repose, entre autres, sur le jumelage de ces deux approches.
Ce projet représente également une valeur ajoutée en ce qu’il permet le développement de nouvelles solidarités : d’abord entre les personnes en situation de pauvreté ou d’endettement, qui vivent souvent honte et isolement, mais également, entre trois groupes d’acteurs qui ont peu d’occasion d’échanger et de travailler ensemble à la réalisation d’un projet collectif.
Notre présentation fera état de notre démarche, des enjeux soulevés et des défis qui nous attendent.
Mots clés :
Pauvreté, Action collective, Co-construction
← Retour à la liste des articles