La planification insurgente dans les quartiers populaires de Pointe-Saint-Charles à Montréal et du Deux Juillet à Salvador de Bahia :

Année : 2017

Thème : rencontre des savoirs et émergence de nouvelles subjectivités

Type : Analyse d'expérience : d'intervention, de formation, de recherche...

Auteur(s) :

LATENDRESSE Anne (Canada) – latendresse.anne@uqam.ca
MANZI MAYA (Brésil) – mayamanzi@gmail.com

Résumé :

À partir des années 1960, nous voyons émerger progressivement une préoccupation pour la participation des citoyens et des citoyennes à la planification territoriale, et en particulier à la planification urbaine (Arnestein, 1969; Bacqué et Gauthier, 2011). La diffusion de cet idéal participatif (ou cet impératif participatif pour reprendre les mots de Blondiax et Sintomer, 2002) a donné naissance à une diversité de dispositifs participatifs qui mettent en relation des acteurs provenant de différents secteurs, le plus souvent du public, du privé, de la société civile ou de citoyen-nes. Alors que la très grande majorité des dispositifs de planification urbaine, associés à la planification collaborative, sont institutionnalisés, il apparaît ici et là quelques expériences de planification participative (entendue ici au sens générique du terme) menées de façon autonome par des mouvements urbains. Que ce soit en vue de contester les orientations et projets de développement ou de revitalisation urbaine promus par la municipalité ou les élites, pour s’opposer à un projet spécifique qui risque de déstructurer leur quartier ou résister à la gentrification, ces expérimentations relèvent de l’initiative de mouvements urbains qui ont comme ambition de développer des propositions d’aménagement sur leurs propres bases et de façon indépendante de la municipalité, en vue de mieux affirmer une vision contre-hégémonique du quartier. Ces démarches, qualifiées de planification insurgente par Miraftab (2009), misant sur la rencontre du savoir populaire et du savoir expert, visent ainsi à développer de nouvelles façons de faire, de nouvelles alliances et à consolider le socle de leur solidarité. C’est le cas des Opérations populaires d’aménagement menées dans le quartier de Pointe-Saint-Charles à Montréal, de même que l’expérience menée dans le quartier populaire 2 do Julho ( 2 juillet), un quartier populaire de la ville-centre de Salvador de Bahia (Latendresse et Manzi, 2016).

À partir de ces deux expériences auxquelles les auteures de cette proposition ont été associées à titre de chercheures engagées, nous allons tenter de démontrer que par le biais de programme de services à la collectivité (appelé programme Extension dans les universités brésiliennes), la rencontre de professeur-es, d’étudiant-es avec des militant-es et des citoyen-nes engagés dans des luttes urbaines permet de décloisonner les savoirs, de clarifier les enjeux de la revitalisation urbaine, de même que de construire des nouvelles représentations du quartier.

Nous verrons que tant par le biais d’exercices de délibérations autour des enjeux du quartier qu’implique la planification participative (Forester, 1999; Innes, 1995), que par le biais des contacts avec les élu-es, les professionnel-les de la municipalité, la rencontre de professeur-es, d’étudiant-es, de militant-es et de citoyen-nes favorise le développement de nouvelles façons de faire qui, sous certaines conditions, contribuent à l’appropriation territoriale par les citoyen-nes. Ainsi il est possible d’avancer comme hypothèse que la rencontre de ces savoirs et la confrontation des différentes représentations du quartier, par le biais de la planification participative, contribuent à l’émergence de nouvelles subjectivités qui priorisent des valeurs de justice socio-spatiale et du droit à la ville (Lefebvre, 1968) à l’échelle du quartier. Toutefois, cette solidarité qui se tisse à partir de démarche participative à l’échelle du quartier, est confrontée au piège du localisme. Dès lors, comment penser la ville ou la métropole comme espace politique de construction de solidarités plurielles et diversifiées ?

Mots clés :

Mouvement social, Participation, Quartier

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