Résider en pension de famille : un mode de logement où prime la solidarité entre pairs
Année : 2017
Thème : Recherche : orientée vers la pratique, action, évaluative...
Type : Recherche : orientée vers la pratique, action, évaluative...
Auteur(s) :
HALIFAX Juliette (France) – juliette.halifax@apradis.eu
LABASQUE Marie (France) – marie.labasque@irffe.fr
Résumé :
« La résidence sociale dénommée "pension de famille" est un établissement destiné à l’accueil sans condition de durée des personnes dont la situation sociale et psychologique rend difficile leur accès à un logement ordinaire » (art. L. 633-1 du Code de la construction et de l’habitation). Il s’agit donc d’établissements collectifs où les résidents occupent un logement individuel, pour lequel ils sont locataires. Ainsi, il ne s’agit pas d’hébergement, mais bien de logement, encadré par un ou plusieurs professionnels issus la plupart du temps du domaine social ou de l’animation.
Fin 2016, l’APRADIS Picardie a finalisé une étude interdépartementale sur les besoins sanitaires et sociaux des résidents de pensions de famille. Réalisée à la demande de la Direction Régionale de la Jeunesse, des Sports et de la Cohésion Sociale (DRJSCS) Hauts-de-France, cette étude visait principalement à déterminer ces besoins ainsi que les réponses apportées, afin notamment de pouvoir anticiper les besoins liés au vieillissement de la population. Une double méthodologie a été employée :
•Une analyse des rapports d’activité de l’ensemble des pensions de famille des départements de l’Aisne, de l’Oise et de la Somme. Cette analyse a permis de dégager les spécificités des structures en matière d’organisation, d’implantation, de fonctionnement et de caractéristiques sociodémographiques et problématiques des résidents.
•Des entretiens semi-directifs auprès d’un panel de dix pensions de famille déterminées à partir du matériau issu de la première phase d’étude. Les entretiens avec les résidents se sont déroulés sur la base du volontariat, en deux temps : tout d’abord en entretien collectif, puis en entretien individuel afin d’approfondir les questions de dépendance et de perte d’autonomie. Près de 80 résidents ont été interrogés, dont 38 en entretien individuel approfondi. De plus, 16 professionnels ont également été interrogés, les hôtes étant des personnes ressources pour apporter des réponses aux besoins des résidents.
Les entretiens ont permis d’observer que les ressources n’étaient pas seulement institutionnelles et que la solidarité entre résidents était également primordiale. Pour exemple, près de la moitié des résidents interrogés souhaite rester vivre au sein de la pension de famille « le plus longtemps possible » ou « y terminer [leur] vie ». Ces résidents ne se projettent pas du tout en dehors de la pension de famille et ne se voient pas vivre ailleurs. Si la question de la collectivité semble importante pour eux et que ne pas vivre seul les rassure, la question de la solidarité est également forte. Ainsi, pour les plus âgés, le passage dans un autre établissement collectif de type maison de retraite ou établissement pour personnes âgées est également difficilement envisageable car ils se sentent « en famille » au sein de la pension de famille et ne retrouveront pas ça ailleurs.
De plus, il ne s’agit pas seulement d’établissements collectifs, mais de lieux de vie où chacun va prendre soin de ses voisins. Lorsqu’une personne est absente au "café du matin" ou qu’elle n’est pas sortie de chez elle depuis plusieurs jours, les autres résidents vont s’inquiéter et aller vérifier que tout va bien. Il ne s’agit pas de surveillance ou de contrôle, mais plutôt de solidarité bienveillante et de soutien pour des personnes qu’ils savent pouvoir être en grande difficulté (troubles psychiatriques, dépendance à l’alcool ou à la drogue, etc.) De même, les résidents vont s’inviter les uns chez les autres pour partager un repas, discuter, couper les cheveux du voisin ou lui faire un peu de couture. De nombreux résidents ont évoqué la nécessité de pouvoir « se rendre utile » auprès des pairs. D’autres, ayant connu la vie en milieu ordinaire, déclarent que c’est cette solidarité qu’ils regretteront le plus lorsqu’un jour ils quitteront la pension de famille.
Mots clés :
Solidarité de proximité, Action alternative, Politique sociale
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