Soutenir l’articulation recherche-terrain en protection de la jeunesse : les interventions axées sur la fonction réflexive de l’enfant

Année : 2017

Thème : Analyse d'expérience : d'intervention, de formation, de recherche...

Type : Analyse d'expérience : d'intervention, de formation, de recherche...

Auteur(s) :

LAFORTUNE David (Canada) – david.lafortune@hotmail.fr
TERRADAS Miguel M. (Canada) – miguel.terradas@usherbrooke.ca
DOMON-ARCHAMBAULT Vincent (Canada) – vincent.domon-archambault@usherbrooke.ca

Résumé :

Contexte : Les statistiques provinciales et fédérales soulignent l’incidence croissante de la maltraitance infantile dans les quinze dernières années (Association des Centres jeunesse du Québec, 2014; Trocmé et al., 2010). Plusieurs corrélations sont désormais établies entre les mauvais traitements chroniques et le développement de troubles chez l’enfant aux plans comportemental, social, cognitif, moteur ou somatique (Norman et al., 2012).
Dans les réseaux étatiques et communautaires au Québec, les programmes d’intervention destinés aux enfants victimes de maltraitance sont majoritairement guidés par une approche fonctionnaliste, axée sur l’écart entre les comportements actuels de l’enfant et ceux jugés adéquats. Aussi, les évaluations de programme documentent peu les facteurs contribuant à leur appropriation par les milieux ciblés; la démonstration empirique de leur pertinence et de leur efficacité repose majoritairement sur des devis quasi-expérimentaux, mesurant les effets post-intervention sur différentes variables cliniques chez l’enfant. Pourtant, cette tendance est propice à générer une déconnexion entre les objectifs scientifiques du chercheur et les besoins de formation ressentis par les praticiens, creusant ainsi l’écart entre la recherche et sa mission sociale (Lafortune et Gilbert, 2016).
Cette communication entend appuyer la pertinence des méthodologies participatives dans ce contexte clinique, de même que proposer des solutions aux défis inhérentes à l'appropriation de nouvelles manières d'intervenir auprès des enfants victimes de maltraitance. Nous présenterons également une approche novatrice en contexte de maltraitance, basée sur le développement de la fonction réflexive de l’enfant (FRE). Son développement, par l’intervention, est associé à une fréquence moindre des comportements externalisés ou d’évitement chez l’enfant (Fearon et al., 2006), à une amélioration du lien d’attachement, ainsi qu’à la résilience face aux expériences de maltraitance (Berthelot et al., 2015; Fonagy et al., 1994).
Méthode : Une recherche-action consistait en l’implantation et l’évaluation d’un programme d’intervention manualisé, visant le développement de la FR d’enfants de 6 à 12 ans signalés pour maltraitance et présentant des troubles sévères du comportement. Ce programme pilote était intégré à la pratique courante des éducateurs du Centre jeunesse de Laval. Au fil de l’accompagnement des intervenants (formation, intervision), plusieurs enjeux méthodologiques, organisationnels et éthiques ont été identifiés, relativement à la transformation des pratiques préexistantes. Le récit de cette expérience d’intervention illustrera comment furent générés les savoirs de « pratique » et « d’expérience » (Heron, 1996), au sein du climat collaboratif praticiens-chercheurs.
Conclusions : Les programmes basés sur le développement de la FRE offre un cadre conceptuel et clinique permettant la transition d’une approche habituellement orientée sur la gestion comportementale des conduites problématiques de l’enfant, vers une approche compréhensive intégrant l’analyse des processus impliqués dans les perturbations relationnelles et comportementales chez celui-ci (Ordway et al., 2014). Quant aux approches participatives, elles sont un levier puissant pour la mobilisation des connaissances, où les regards croisés entre praticiens et chercheurs facilitent à la fois : 1) l’émergence d’une communauté d’apprentissage et de solidarité recherche-terrain; 2) le développement d’une intervention ancrée dans la réalité des services; 3) la pérennisation des pratiques nouvellement acquises et des partenariats avec les milieux. Plusieurs moyens seront proposés pour encourager un climat collaboratif propice au partage des expertises, de même que seront présentées des stratégies pour accompagner le vécu inhérent à l’appropriation et au changement, compte tenu de la complexité́ des (re)positionnements que cette mouvance implique pour les praticiens et les chercheurs.

Mots clés :

Intervention sociale et travail social, Santé mentale, Recherche-action

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