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Comment « apprendre » collectivement à recomposer nos solidarités ? Nouveaux défis de l’action sociale pour demain

Année : 2017

Thème : Conférence plénière congrès de Montréal

Type : Autre (poster, ...)

Auteur(s) :

MAESSCHALCK Marc (Belgique) – marc.maesschalck@uclouvain.be

Résumé :

Le travail social tant comme forme d’intervention publique que comme action communautaire concerne directement le sens et les modalités de la participation démocratique. Pour le recomposer aujourd’hui, il est essentiel de chercher à donner la parole à tous les concernés à travers des processus de conscientisation. Mais comment apprendre ensemble à relever ce défi, sans reproduire les cloisonnements professionnels, institutionnels, voire même socio-culturels qui bloquent les apprentissages en commun et conduisent à répéter des routines favorables au contrôle et à la quantification des pratiques?
Nos recherches sur l’intervention sociale nous ont amené à explorer les ressources du tournant pragmatiques dans les sciences sociales et à tenter de reprendre les différentes leçons qu’il contient à propos des conditions de production d’un collectif intelligent capable de modifier ses modes de résolution de problème tout en remettant en question les différents rôles impliqués dans ces échanges de pratiques et de savoir. Il a aussi semblé intéressant de combiner ces ressources avec les apports de perspectives plus sensibles aux ancrages contextuels de l’action comme la cognition située, l’auto-confrontation croisée, voire le diagnostic partagé, pour mieux tenir compte de l’influence des processus adaptatifs sur les apprentissages et d’éventuels mécanismes de répétition des comportements. Le désir de changement induit par des formes d’intervention coopératives peut aussi être surdéterminé par des effets de peur et de résistance qui échappent à l’intervention mais s’imposent comme des conditions pour sauvegarder ou renforcer une identité de groupe ou un intérêt commun supposé. En combinant les ressources du pragmatisme social de co-construction et celles d’un situationnisme de précaution, il est possible d’agir en même sur l’accroissement des connaissances partagées et sur l’évitement des blocages suggérés par les habitudes interprétatives.
Mais un élément supplémentaire nous semble encore devoir être pris en compte au-delà de cette tentative de combinaison de deux ressources théoriques liées à l’intervention dans les champs pratiques. Il s’agit de la gouvernance de ces processus d’intervention. Il ne s’agit pas uniquement dans ce cas de s’interroger sur les pouvoirs subsidiants, les missions ou les textes législatifs. La question est d’abord celle de la place qu’occupe dans les réflexions et les tentatives de transformation des interventions la fonction remplie par leur gouvernance. Comment cette question est réappropriée par les acteurs concernés, quelle place elle occupe pour eux, selon quel angle d’approche ? La fonction de gouvernance n’est pas extérieure aux acteurs qu’elle concerne et ceci pas uniquement pour des raisons critiques liées au fait de subir une forme d’action sur l’action des autres, donc un pouvoir. La fonction de gouvernance est aussi dépendante de la manière dont chacun conçoit son rôle et son potentiel d’incitation. Théoriser cette fonction pour les acteurs concernés c’est la condition première d’une attitude plus active à son égard.
Qu’attendre d’une gouvernance de formes d’interventions qui s’orientent vers l’accroissement de l’intelligence de collectifs rassemblant professionnels et bénéficiaires et qui visent à réduire les effets de répétitions induits par les contextes ? Les modes d’intervention peuvent-ils évoluer sans que les modes de gouvernance évoluent? De quel intérêt social procèdent réellement les modes de gouvernance proposés ? En quoi sont-ils capables d’accompagner de manière crédible des processus visant l’intervention sociale à devenir plus responsable, plus participative, plus collaborative, etc. s’ils ne sont pas eux-mêmes marqués par ces options préalablement à tout choix méthodologique ? L’idée du Foucault de l’herméneutique du sujet à la lecture de l’Alcibiade n’était-elle pas qu’avant de vouloir gouverner, il fallait être en mesure d’exprimer ce qu’il en serait pour soi d’être bien gouverné ? Notre idée serait donc qu’une transformation des modes d’intervention sociale capable de recomposer nos solidarités aujourd’hui passe aussi nécessairement par cet enjeu : comment une telle transformation des solidarités conduites par les interventions sociales peut-elle être bien gouvernée ? Quelle place donner aux acteurs concernés dans une redéfinition des formes de gouvernance du social, basée dès lors elle aussi sur un savoir collaboratif et sur une meilleure conscience de ses ancrages ?

Mots clés :

Solidarité, Société civile, Action collective

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