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Risques, normes et régimes de justification de l’action

Année : 2010

Thème : Les usages des bonnes pratiques de lutte contre les violences institutionnelles dans les établissements sociaux.

Type : Analyse d'expérience : d'intervention, de formation, de recherche...

Auteur(s) :

PETRY Philippe (France) – philippe.petry@gmail.com

Résumé :

Accueillir des enfants maltraités ou abusés en établissement comporte des « risques ». : Les établissements sociaux censés traiter le phénomène peuvent devenir des lieux de maltraitance.
Les professionnels du secteur sont aux prises quotidiennement avec cette difficulté usante
Les recommandations de « bonnes pratiques » récemment édictées par l’ANESM (agence nationale de l’évaluation et de la qualité des établissements et services sociaux et médico-sociaux) s’inscrivent dans une démarche de « gestion des risques » qui tente de transformer profondément la culture de ce secteur fondée sur une conception du risque comme « pari éducatif ».
Cette communication part d’une pratique dans une importante association œuvrant dans le secteur de l’enfance en danger. (Plus de 40 maisons d’enfants à caractère social réparties sur tout le territoire français.)
Dès 2001 j’y ai mis en place avec une collègue juriste, un « observatoire » des incidents permettant une remontée nationale et ai réalisé une enquête de victimation (dans le cadre d’un appel à projets de l’observatoire national de l’enfance en danger).
Cet observatoire interne des violences, permet de suivre les faits dont les professionnels (éducateurs et enseignants) sont victimes ou auteurs (300 incidents sur 3000 faits déclarés environ par an).
Ce dispositif s’accompagne d’interventions auprès des équipes et de création de dispositifs de relecture, de prévention et d’accompagnement à différents niveaux. (Siège, directions régionales, établissements, équipes.)
Le but de cette communication est de comparer les différentes modalités possibles d’intervention auprès des équipes avec l’hypothèse que la modification des pratiques est complexe et ne se réduit pas à une affaire de techniques ou de boîte à outils : chaque modalité d’intervention présentant des intérêts mais aussi des limites qu’il s’agira de comparer.

L’hypothèse est qu’une imposition de normes peut permettre une nomination des formes de violence en équipe, un travail sur la souffrance et l’usure professionnelle à condition que se crée du tissu institutionnel vivant dans des collectifs aux prises avec la contradiction du formalisme des normes et des pratiques. C’est-à-dire capables d’interroger la légitimité de leurs actions parmi plusieurs hypothèses d’intervention possibles et de soutenir des controverses sur les modes de légitimation.
Pour faire face aux conduites à risque des jeunes, ces collectifs doivent pouvoir mettre au travail leur propre normativité.
Je décrirai les jeux équivoques des normes et du risque au travers des empilements polyphoniques des niveaux institutionnels en posant la question de l’emprise de l’organisation et de la prise possible des professionnels sur les situations auxquelles ils sont confrontés (grâce au recours à la notion d’asymétrie de prises de Chateauraynaud).
Il s’agira de décrire les usages polyphoniques du risque et des normes selon un jeu d’échelles (Borzeix, Revel) allant des risques du métier à la gestion des risques dans les politiques publiques. Cette description se réfère à la notion de Grammaire de l’intervention de Nélisse et Zuniga et d’épreuve de professionnalité (Ravon).
Ces jeux seront aussi interrogés à partir de notions classiques : savoirs experts/savoirs d’action, travail prescrit/travail réel (Clot et Barbier), conflits de légitimité (Boltanski et Thévenot) Tripier, (l’aveuglement organisationnel) Weick (la construction du sens dans l’organisation).
En conclusion je reviendrai sur mon positionnement de conseiller technique ou consultant interne, passant de l’intervention directe auprès des équipes au travail en indirect sur des procédures ou des recommandations nationales, à partir des travaux de Clot (activité, genre, style, catachrèse) et Dejours (coordination coopération).

Mots clés :

Politique sociale, Etat social, Professionnalisation, Protection de l'Enfance

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