LE MODELE D’INTERVENTION DU WAPIKONI : LA CRÉATION CINÉMATOGRAPHIQUE ET MUSICALE COMME OUTILS DU VIVRE ENSEMBLE
Année : 2017
Thème : Conférence plénière congrès Montréal
Type : Autre (poster, ...)
Auteur(s) :
BARBEAU Manon (Canada) – info@wapikoni.ca
Résumé :
Le Vidéo Paradiso et le Wapikoni mobile sont des studios ambulants d’intervention, de formation et de création audiovisuelle, le premier destiné aux jeunes de la rue, le second aux jeunes autochtones des communautés éloignés. Le Vidéo Paradiso a sillonné durant trois ans les quartiers chauds de Montréal et de Québec donnant la parole aux jeunes de la rue. Le Wapikoni mobile, quant à lui, en est à sa douzième année d’existence, a roulé vers 58 communautés éloignées au Québec et au Canada et desservi des milliers de jeunes autochtones. Nous nous attarderons ici à ce dernier projet qui a généré à ce jour plus de 900 films, comme autant de ponts vers l’autre, vers cette solidarité dont nous rêvons tous, entre humains d’horizons différents partageant un même territoire, plus ou moins vaste.
Le Wapikoni a été cofondé en 2003 par le Conseil des jeunes des Premières Nations, et le Conseil de la Nation Atikamekw et moi-même. Wapikoni Awashish, une jeune atikamekw de 20 ans en est l’inspiratrice. Comme cinéaste, je travaillais alors à l’écriture du scénario collectif « La fin du Mépris » avec un groupe de quinze jeunes autochtones de Wemotaci, petite communauté située au nord de La Tuque. Wapikoni (qui veut dire « fleur » en atikamekw) était la figure de proue de ce groupe et mon bras droit. Un accident de la route avec un camion forestier allait toutefois lui enlever la vie en juin 2002. L’écriture du scénario a été interrompue et le Wapikoni mobile a été créé pour servir la collectivité. Il porte son nom pour honorer sa mémoire.
Quatre studios ambulants ont depuis été aménagés. Pourvus d’une pièce centrale servant de lieu de formation et de projection, d’une salle de montage et d’un studio d’enregistrement, ils sont munis d’équipements à la fine pointe des technologies numériques. Ainsi équipés et répondant à l’invitation des chefs et des Conseils de bande, les studios ambulants se rendent dans les communautés éloignées pour offrir aux apprentis cinéastes des ressources auxquelles ils ont difficilement accès.
Durant 4 semaines, deux cinéastes formateurs, un intervenant jeunesse et un coordonnateur local encadrent ces ateliers qui regroupent en moyenne 25 participants et génèrent 5 courts-métrages sur des thématiques choisis par les participants eux-mêmes. Au terme de la formation, les œuvres sont présentées devant la communauté lors d’une projection publique, rassemblant des centaines de personnes (famille, amis, aînés, représentants du Conseil de bande). Il s’agit toujours d’un moment fort de fierté identitaire de la collectivité et de rapprochement intergénérationnel.
Le point d’orgue des activités du Wapikoni mobile est sans conteste, le lancement annuel de leurs courts métrages dans le cadre du Festival du nouveau cinéma devant le grand public montréalais. Les cinéastes autochtones viennent alors de loin pour établir un dialogue avec des spectateurs de plus en plus nombreux chaque année. Ceux-ci ont manifesté une fois de plus leur soutien lors du dernier événement, le 14 octobre 2016 dans la prestigieuse salle du Cinéma Impérial, affichant salle pleine.
Ces films débutent par la suite un circuit international participant à plus de 250 événements publics chaque année dans des festivals, colloques et forums divers et contribuant ainsi à rendre visible ce peuple trop longtemps invisible. Des ateliers de sensibilisation aux réalités des Premières Nations sont aussi organisés dans les écoles.
Car le mandat du Wapikoni est multiple : briser l’isolement des communautés éloignées et contrer les idées noires, donner une voix et la faire entendre du plus grand nombre, développer la fierté culturelle et identitaire, développer l’empowerment et le leadership, créer des ponts vers l’Autre, réduire ainsi racisme et préjugés et contribuer à la solidarité entre les peuples.
Au-delà de l’art et de la liberté d’expression, la vidéo et la musique deviennent alors de puissants outils de transformation sociale pour les jeunes des Premières Nations et pour la société en général.
Initié par le Wapikoni en 2014 le RICAA, premier Réseau International de Création Audiovisuel autochtone, crée des ponts avec des créateurs et des organismes audiovisuels autochtones à travers le monde. Il regroupe maintenant 50 membres de 18 pays. Ces créateurs d’horizons différents, qui partagent les mêmes valeurs, les mêmes problématiques, les mêmes enjeux, les mêmes rêves, peuvent ainsi unir leurs voix et se faire entendre par la création d’œuvres cinématographiques collectives et travailler ensemble à la solidarité entre les peuples, autochtones et non autochtones, dans le but d’un enrichissement réciproque et d’une société plus juste.
Mots clés :
Solidarité, Solidarité, Solidarité
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