SAVARD Sébastien (Canada) – ssavard@uottawa.ca
SAVARD JACINTHE (Canada) – jsavard@uottawa.ca
KUBINA Lucy-Ann (Canada) – lkubina@uottawa.ca

Au Canada, la pluralité des réalités s'exprime également sur la dimension linguistique. Comme la plupart des pays occidentaux qui sont des terres d'accueils pour de nombreux migrants, plusieurs langues sont parlées à la maison par la population canadienne. Cependant, ce qui distingue le Canada de la plupart des autres pays de l'OCDE (outre la Belgique et la Suisse), est la présence de deux langues officielles soit l'anglais et le français. Le français, bien que langue officielle, est minoritaire (elle est la langue officielle de préférence de 24% de la population) et en décroissance en termes de de proportion de la population en mesure de l'utiliser couramment. La population francophone est également fortement concentrée dans la province du Québec où 80% de la population parle cette langue à la maison. Dans les autres provinces, la langue française est parlée par une minorité des citoyens et dans la majorité d'entre elles, par une très petite partie de la population. De ce fait, même si le statut de langue officielle donne aux utilisateurs de la langue française des droits protégés par la Constitution, en réalité, la faible proportion de francophones dans les autres provinces que le Québec rend très difficile l'accès à des services sociaux et de santé pour les francophones vivant en contexte minoritaire. Cette difficulté d'accès aux services en français est préoccupante, car elle peut avoir des impacts négatifs importants sur la santé des francophones (Beaulieu, 2010; Boileau, 2009; Bowen, 2001; Comité consultatif, 2007; Corbeil, Grenier, Lafrenière, 2007). En effet, des recherches ont démontré que l'incapacité de recevoir des services dans sa langue favorise les erreurs de diagnostic. des mauvais choix de traitement et une plus faible mobilisation des individus envers le plan de soins proposé (Bowen, 2001; 2015; Drouin et Rivet, 2003; Ferguson et Candidb, 2002; Irvine et al. 2006, Flores et al. 2003). Le présent article veut présenter les résultats d'une recherche réalisée dans deux provinces canadiennes, le Manitoba et l'Ontario, sur les stratégies utilisées par les établissements de santé et de services sociaux pour favoriser l'accès aux services aux ainés francophones en situation minoritaire, les défis et difficultés rencontrées par les fournisseurs de soins pour répondre à leurs obligations envers cette population et l'expérience vécue par les ainés francophones dans leurs interactions avec le système de santé et de services sociaux. 25 gestionnaires, 37 intervenants sociaux et 48 ainés ont été rencontrés en entrevues individuelles ou en groupes de discussion. Les données recueillies nous ont permis d'identifier les principaux leviers permettant d'améliorer l'offre active de services sociaux et de santé aux ainés francophones en situation minoritaire et de formuler des recommandations destinées autant aux décideurs, intervenants et membres des communautés francophones en vue de mieux répondre aux besoins de cette communauté. Il ressort en effet de notre étude que l'amélioration du déploiement des services sociaux et de santé aux ainés francophones ne peut reposer uniquement sur les épaules des établissements sociosanitaires. Tous les acteurs impliqués (décideurs politiques, gestionnaires, intervenants, communautés francophones et les organismes voués à la promotion de leurs intérêts) ont un rôle à jouer et doivent collaborer dans la mise en place d'un continuum de services sociaux et de santé pour les ainés francophones en situation minoritaire.

Santé, minorité linguistique, offre active, francophonie.