Et si la recherche d'équité nuisait au vivre ensemble ?
Année : 2019
Thème : Analyse d'expérience : d'intervention, de formation, de recherche...
Type : Analyse d'expérience : d'intervention, de formation, de recherche...
Auteur(s) :
Girardet Khedidja (Suisse) – khedidja.girardet@hetsl.ch
BERGER Jean-Claude (Suisse) – jean-claude.berger@eesp.ch
Résumé :
Axe 4 : Orientations des formations et développement des milieux de pratiques.<br /><br />Et si la recherche d’équité nuisait au vivre-ensemble ?<br />Alors que d’un côté, on ne cesse dans nos parlements de voter des lois et des modèles d’organisation pour viser, nous dit-on, davantage d’équité, d’un autre côté, nous observons plutôt davantage d’intolérance à la différence et la diversité. Inexorablement, années après années, des pressions de différentes natures sont imposées sur les institutions sociales, au sens large, pour réaliser des économies, engager plus de prestations avec moins de moyens. Répartir autrement ou revoir les catégories de personnes en difficultés. Ceci pour viser et garantir une meilleure maîtrise ou un contrôle des coûts. Un management de plus en plus hiérarchisé, des fusions d’institutions et des comptabilités analytiques sont imposés. Quels sont les impacts de cette approche, de ces changements, tant sur les travailleurs sociaux que sur les bénéficiaires ? Quels en sont les effets sur le vivre-ensemble ?<br />Le vivre-ensemble ne se décrète pas, il doit être constamment stimulé. La question identitaire demeure au cœur de ces malaises ou replis. Un exemple, alors que le projet d’inclure les enfants en situation d’handicap dans des classes ordinaires pour favoriser le vivre-ensemble, combien de ces enfants sont en souffrance et combien d’enseignants sont en burnout ? Les moyens pour accompagner cette politique ne sont pas à la hauteur des besoins réels.<br />Ethique et équité, Mme Brigitte Bouquet (2000) pose ces questions essentielles :<br />L’âge d’or de l’éthique est-il un nouveau mythe de la modernité ? <br />Signifie-t-il un ensemble de discours tendant à occulter les diverses contradictions de la société, dans un siècle soucieux de confort ?<br />Ou relève-t-il un sentiment d’injustice et une tentative pour reformuler les contradictions et pour les prendre en compte ?<br />Selon Marcel Gauchet (2000), la société n’a plus ni tradition ni autorité transcendante, donc elle tente de s’approprier des principes éthiques et moraux. Mais on éprouve le sentiment que les repères hérités sont insuffisants et inadéquats pour faire face aux problèmes actuels inédits. La demande éthique se fait sur fond de culpabilité et d’angoisse, de crise identitaire et sécuritaire.<br />Certes, le constat de Marcel Gauchet laisse peu de place aux réjouissances. L’action sociale est orchestrée et tiraillée entre des logiques politiques et gestionnaires parfois complètement paradoxales qui viennent ainsi ajouter un mal-être toujours plus grandissant dans les professions de l’humain. <br />Un des traits constitutifs du travail social est qu’il ne peut esquiver la question du sens qui constitue la matière même des pratiques, leur substantifique moelle. Or l’éthique est une des sources de sens et ne peut être considéré comme une sorte de valeur ajoutée car elle est l’essence même de l’action du travailleur social (Bouquet, 2002).<br />Que faire ? Le concept de l’entre, proposé par le Dr. Amilcar Ciola, revêt encore aujourd’hui tout son intérêt pour diminuer les effets des catégorisations et stimuler le vivre-ensemble.<br />L’entre, nous en connaissons quelques expressions familières: être assis entre deux chaises, entre les deux mon cœur balance, etc. Elles expriment une situation inconfortable, délicate, voire conflictuelle.<br />Selon Ciola, il est plutôt à prendre comme espace privilégié se situant entre deux réalités ou pôles, qui permet de découvrir et d'exploiter les richesses de chacune de ces réalités. Dans ce contexte, l'entre est un espace nouveau dans lequel on trouve des intérêts, et on se donne les moyens de rester. L'individu riche de cet entre peut, tel un balancier, choisir d'évoluer vers un pôle ou vers l'autre en fonction de la situation de manière constructive, non exclusive. <br />Il y a ainsi des perspectives renouvelées pour le vivre-ensemble, d’autant plus que, pour le travail social, l’évolution implique d’avoir des professionnels sachant agir sur plusieurs champs et moins orientés spécifiquement comme éducateur social, animateur socioculturel ou assistant social.<br />
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