Les déclencheurs d’un changement de regard sur les jeunes à Charleroi 

Année : 2019

Thème : Quand un projet collectif d’insertion ébranle les formes dominantes de catégorisation

Type : Recherche : orientée vers la pratique, action, évaluative...

Auteur(s) :

BINGEN Aline (Belgique) – aline.bingen@ulb.ac.be

Résumé :

Le projet européen "Popul'art cité : street art et revitalisation urbaine au rendez-vous de l'insertion des jeunes à Charleroi" a fait le pari, entre 2015 et 2018, de réunir un nombre important d'acteurs issus des secteurs de l’animation socioculturelle, de l’aide sociale, de la préformation ainsi que de la formation professionnelle autour de collectifs de jeunes en grande précarité issus des quartiers de Charleroi. Au-delà de l’objectif d’insertion à l’emploi ou en formation, l’expérimentation du parcours intégré d’insertion socio-professionnelle a permis d’analyser les dynamiques d’interaction entre intervenants sociaux et jeunes engagés dans des « espaces de recomposition sociale » (Roulleau-Berger,1993). <br />Au cœur du projet « Popul’art Cité », la réalisation d’un projet artistique d’embellissement de quartier (spécifique pour chaque année, en fonction des zones de recrutement des jeunes) a servi de fil conducteur aux actions : pour accrocher les jeunes en les associant au choix de l’oeuvre, pour leur faire découvrir les métiers associés au projet et pour les inciter à acquérir les qualifications nécessaires à sa concrétisation. De nombreuses difficultés ont ponctué le parcours, tout au long des trois années du projet. Parmi celles-ci, les regards se sont entrechoqués (entre partenaires ainsi qu’entre partenaires et jeunes) à partir de logiques d'actions, de langages, d'exigences et de contraintes spécifiques. Les perceptions des jeunes ont interrogéles catégories d’insertion et d’exclusion construites dans les institutions » (Roulleau-Berger, 1993). Les usages juvéniles de l’aide sociale (Muniglia, Rothé, 2013) et les logiques d’adhésion aux activités ont rendu compte de dynamiques individuelles ou collectives à l'oeuvre mais aussi de l'ambivalence caractéristique de certaines interactions. <br />Dans un contexte de politiques actives de l’emploi, le rapport des jeunes au travail s’inscrit dans formes de socialisations plurielles et renvoie au « double-bind » entre l'injonction à travailler et l'impossibilité de travailler sous les formes prescrites (Castel, 1995). Le projet « Popul’art Cité » permet alors de mettre en perspective les formes dominantes d’accompagnement et de « traitement clinique du chômage » (Orianne, 2007) au profit d’une logique de co-production et d'élargissement des visions qui va à l’encontre des logiques personnalisation, de contractualisation et de responsabilisation des prestations sociales qui caractérisent les politiques d’insertion (Castel, 1995 ; Duvoux, 2009). A titre d’exemple, alors que la première année de l’expérience pilote, la revendication dominante des partenaires portait sur la nécessité de devoir répondre aux problèmes sociaux des jeunes préalablement aux actions dans une perspective d’adaptation des jeunes aux pratiques d’intervention habituelles des partenaires, la deuxième année de l’expérience voit surgir la vision selon laquelle la participation aux actions multi-partenariales peut servir de voie de résolution à certains problèmes sociaux. <br />Durant les trois années du projet, les chercheurs ont observé l’expression de nombreux jugements sociaux dans le chef de l’ensemble des acteurs. La présente communication entend analyser, à partir des entretiens semi-directifs et observations réalisés, les moments où les jugements convergent ou se distinguent entre accompagnants et accompagnés ainsi que les « éléments déclencheurs » d’un changement de regard sur les comportements et les potentialités.<br />

Mots clés :

Insertion, Action alternative, Co-construction

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