Mouvements migratoires et réfugiés : défis et perspectives
Année : 2019
Thème : Conférence plénière Beyrouth
Type : Autre (poster, ...)
Auteur(s) :
BOLZMAN Claudio (Suisse) – Claudio.Bolzman@hesge.ch
Résumé :
Les réfugiés en Europe : enjeux et perspectives pour l’intervention sociale
Dans le monde, il y a environ 68,5 millions de migrants forcés (HCR, 2018). Ils et elles se voient dans l’obligation de quitter leur lieu habituel de vie ou leur Etat suite à une situation de violence politique (conflits armés, guerres civiles, persécutions…). La majorité de ces exilés se déplacent à l’intérieur de leur pays (40 millions), alors que d’autres cherchent r refuge dans un autre Etat (28,5 millions) pendant une période dont on ne peut prévoir la durée. La grande majorité de ces derniers (quatre réfugiés sur cinq) se déplacent vers des Etats voisins pour des raisons d’accessibilité. Ainsi, la plupart des déplacements ont lieu en Afrique et en Asie. Les Etats voisins peuvent difficilement s’opposer à ces mouvements de populations en danger et les personnes qui se déplacent en masse sont reconnues collectivement comme réfugiées. Seule une minorité des exilés se déplacent vers des Etats plus lointains, notamment vers l’Europe. En effet, d’une part il faut disposer des ressources nécessaires pour pouvoir entamer un voyage plus lointain, d’autre part notamment depuis 2016, il est devenu de plus en plus difficile pour les exilés d’entrer sur le continent européen de manière légale et chaque semaine des personnes se noient en Méditerranée en essayant de joindre, dans des embarcations fragiles et surchargées, les rives de ce continent.
Pour les professionnels de l’intervention sociale de nombreuses questions se posent sur ce qui se passe autour des réfugiés. Il y a des interrogations sur des éléments permettant de mieux comprendre le traitement de ces personnes par divers Etats, ainsi que des enjeux éthiques qui demandent clarification. Le but de cette présentation est de contribuer modestement à la réflexion en apportant quelques pistes de contextualisation sociohistorique, mais aussi en mettant en évidence des exemples de formes d’intervention sociale mises en place par des professionnels et des bénévoles et favorisant la mobilisation des ressources des réfugiés, tout en tenant compte des difficultés et limites que l’on peut rencontrer dans ces actions.
L’Europe et la places des réfugiés dans le monde commun
Dans le cas européen, pendant la Deuxième guerre mondiale, de nombreux réfugiés ont été laissés sans protection et n’ont pas pu trouver un pays d’asile face aux persécutions. A la sortie du conflit, pour éviter que des personnes soient considérées à nouveau comme hors de l’humanité et soient condamnées aux pires des traitements dans un silence ahurissant, et parfois dans l’indifférence générale, les Nations Unies se sont dotées d’une charte éthique, la Déclaration universelle des Droits de l’homme. Peu après, en 1951, la Convention internationale des Nations unies sur les réfugiés a été rédigée à Genève et le Haut-commissariat pour les réfugiés a été créé. Il s’agissait de bâtir des normes internationales et de se doter d’un organisme de soutien concret aux personnes victimes de persécutions. Suite à la décolonisation, le Protocole de Bellagio de 1967 a permis d’étendre la protection des réfugiés aux personnes persécutées qui se trouvaient non seulement dans les Etats dits du Nord, mais aussi ailleurs dans le monde.
Lors des années de « guerre froide » les Etats ont mis en œuvre des politiques d’asile qui légitimaient l’accueil des exilés opposés à des régimes répressifs. Les réfugiés étaient perçus comme une migration « noble », donc nécessairement peu nombreuse. Les Etats ont accordé l’asile de préférence aux exilés qui leur permettaient un renforcement de leur légitimité idéologique et diplomatique dans un contexte d’opposition entre deux blocs.
Cependant la protection accordée aux réfugiés commença lentement à s’éroder à partir des années 1980 et se dégrada davantage après la chute du mur de Berlin et la fin de la « guerre froide ». Tout d’abord, le terme « réfugiés » a été moins utilisé dans les Etats européens et on commença à mettre en avant la catégorie de « demandeurs d’asile », puis plus récemment celle de « migrants » tout court. Autrement dit, on commença à émettre des soupçons sur les motifs de déplacement de nombre de ces personnes, en soulignant qu’en fait elles migraient surtout pour des motifs « économiques » plutôt que politiques. L’idée était plutôt qu’il fallait limiter leur nombre. Le déplacement de ces personnes ne fut plus considéré comme une question de protection des droits humains, mais davantage comme un « problème » pour les Etats de destination. Malgré ces obstacles croissants, nombre d’exilés sont présents sur le continent européen.
Enjeux pour l’intervention sociale
Les professions de l’intervention sociale sont associées étroitement à la protection des droits de l’homme. Or, les nouvelles tendances qui se font jour dans les pays européens concernant l’accueil de ces réfugiés, les interpellent et soulèvent des dilemmes éthiques. Cette présentation mettra en évidence certains de ces dilemmes, mais également la créativité dont les professionnels et la société civile font preuve pour soutenir les efforts d’insertion des réfugiés dans leurs lieux d’exil. En effet, nombre d’initiatives voient le jour qui montrent que la question de la place des réfugiés dans le monde commun n’est pas seulement une affaire des Etats. Des professionnels et des bénévoles créent des espaces où les réfugiés sont plus que les représentants d’une catégorie générale et peuvent à nouveau se sentir traités comme des individus pluridimensionnels.
Mots clés :
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