Prise en compte de la parole des enfants et travail social situationnel, un enjeu de transformation sociale
Année : 2022
Thème : Analyse d'expérience : d'intervention, de formation, de recherche...
Type : Analyse d'expérience : d'intervention, de formation, de recherche...
Auteur(s) :
BATAILLE Jean-Marie (France) – bataillejeanmarie@yahoo.fr
Résumé :
Comment prendre en compte la parole des enfants ? Voilà la question formulée par des professionnels de l’animation dans une recherche-action-formation (RAF que nous menons depuis septembre 2020 et qui porte sur l’amélioration de l’accueil des enfants en centre de loisirs). Cette question prolonge nos travaux précédents sur la prise de décision et l’individualisation sociale (de l’auteur, 2010) et pose aussi celle de l’écoute de ce qui arrive aux enfants dans des relations sociales au sein desquelles se glissent des oppressions. La RAF s’est confrontée à ces questions qui mettent en lumière le passage d’un modèle du centre de loisirs centré sur la pratique d’activité, à un autre modèle, qui porterait sur la prise en compte des problématiques des enfants. Derrière ce changement de paradigme apparaissent de nombreuses questions à propos de ce qu’est la parole des enfants et de ce qu’elle peut devenir, à la fois, du point de vue du recueil, de la possibilité et de la félicité de ces paroles. Nous nous appuierons pour notre propos sur une analyse ethnographique d’une séance de formation où l’enjeu d’un changement de paradigme s’est fait jour.<br />1. Après avoir présenté la RAF dans laquelle nous avons mis en lumière ce phénomène, nous nous occuperons de présenter les conditions du passage d’une approche centrée sur la pratique d’activités à une autre s’intéressant aux problématiques que vivent les enfants. Ce changement de paradigme s’appuie sur une double perspective, à la fois la démocratie pensée par Dewey (2005) et la façon dont Jane Addams articule démocratie et éthique sociale (Addams, 2019). <br />2. La séance a mis en lumière une question : à quelles conditions peut-on mettre au travail les problématiques des enfants en s’appuyant sur leurs paroles ? Nous avons évoqué l’exemple de la pédagogie institutionnelle, et avec elle, de la psychothérapie institutionnelle qui proposent de créer des institutions, soit l’environnement dans lequel s’effectue la prise de parole des enfants. À partir de ce détour, il nous a été possible d’observer la présence de plusieurs modalités de prise de parole et de forme de paroles, voire de contenus. En distinguant différentes catégories de paroles, il devient possible de penser la place des enfants dans ce qui les concernent et d’ouvrir un questionnement sur les modalités de prise en compte de leur parole à propos des problématiques qui les touchent. <br />3. Ceci engage alors une démarche pour faire des enfants des participants à la définition des modalités d’action qui les concernent. En même temps, on ne peut envisager cette participation sans s’intéresser aux conditions effectives pour qu’ils participent. S’ouvre alors un autre questionnement à propos du discernement des enfants, de leur concernement (Maurel, 2009) et des décisions qu’ils peuvent prendre au regard de la responsabilité des adultes quant à leur bien être. Les approches anti-oppression (Pullen-Sansfaçon, 2013) ouvrent des pistes pour construire des alliances avec les enfants afin que les situations d’oppression qu’ils vivent puissent être mises au travail. <br />Nous développons ici une nouvelle perspective que nous appelons le Travail social situationnel. Il s’inscrit dans l’analyse situationnelle développée par William Thomas (Lacaze, 2013) mais aussi dans le pragmatisme (Dewey, James, 2007) et l’interactionnisme symbolique de Mead (2006) et Blumer (1937, 1969), et plus encore, dans le travail de Jane Addams. L’enjeu est de trouver les modalités qui permettent de changer les situations qui produisent des expériences d’oppression. La responsabilité des adultes à permettre cette parole et à la prendre en compte est au cœur du changement de perspective que nous avons identifié.
Mots clés :
Participation, Oppression / Travail social situationnel
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