Enjeux épistémologiques dans la recherche collaborative à partir de l’expérience de la MAG
Année : 2022
Thème : Analyse d'expérience : d'intervention, de formation, de recherche...
Type : Analyse d'expérience : d'intervention, de formation, de recherche...
Auteur(s) :
d'Arripe Agnès (Belgique) – agnes.darripe@univ-catholille.fr
DELHAYE Pascaline (France) – pdelhaye@irtshdf.fr
Résumé :
La préoccupation pour la participation des personnes directement concernées à la recherche n’est pas neuve. Dewey (1927/2010) s’y intéressait déjà quand il cherchait à réconcilier science et sens commun via l’enquête sociale. La démocratisation de la recherche prend de l’ampleur et est identifiée comme un des challenges méthodologiques du 21ème siècle (Crow, 2012). Le savoir expérientiel, défini comme « une vérité apprise par l’expérience personnelle d’un phénomène plutôt qu’une vérité acquise par raisonnement discursif, observation ou réflexions sur des informations fournies par d’autres » (Borkman, 1976) tend à être reconnu et intégré dans la recherche en SHS. Cette intégration suppose une méthodologie particulière et révèle de nombreux enjeux.<br />La communication, qui sera présentée par deux chercheures issues de disciplines et d’instituts différents, proposera une réflexion sur les enjeux épistémologiques propres à une méthode prônée en recherche collaborative : la Méthode d’Analyse en Groupe (Van Campenhoudt et al., 2005). Elle prend pour cadre une expérience commune de recherche portant sur la place des personnes accompagnées dans la formation en travail social et au cours de laquelle, dans une visée collaborative et en conformité avec l’objet même de la recherche, a été fait choix de pratiquer cette méthode de recherche (MAG) rassemblant cadres pédagogiques, étudiants, personnes accompagnées et travailleurs sociaux. <br />De façon générale, cette méthode positionne les acteurs comme les meilleurs connaisseurs de leurs pratiques et les place en position de réflexivité. Elle part du postulat que leur connaissance ne se limite pas à une connaissance pratique ou immédiate qui serait opposable à une connaissance construite et distante, privilège du chercheur. <br />La visée démocratique et émancipatoire de cette méthode n’éteint cependant pas la réflexion. Ainsi, après avoir présenté de manière plus détaillée la méthode et les résultats obtenus, nous développerons la réflexion critique autour de plusieurs enjeux épistémologiques (d’Arripe, Delhaye, Janson, à paraitre). <br />Le premier vient questionner l’égalité des rôles et places occupés par les participants à la MAG. Par exemple, l’anonymisation des apports des participants dans le rapport final (alors même que les équipes de recherche y sont identifiées) pose le problème de l’autorat (Sarna-Wojcicki, 2017). Par ailleurs, dans la MAG, ce sont les chercheurs qui établissent les divergences-convergences entre les interprétations des participants et qui amènent les apports théoriques en les vulgarisant. En revanche, ce sont les participants seuls qui formulent des interprétations : les chercheurs sont-ils en dehors du débat social ? <br />Cette question des places et des rôles de chacun renvoie à un second enjeu autour de la compatibilité entre engagement et production de connaissances. L’articulation des savoirs ne va pas de soi. On peut notamment identifier une « tension pensable » (Vinatier & Morrissette, 2015, p 142) entre investigations théoriques et interventions au service des professionnels. Peut-on prétendre favoriser le développement du pouvoir d’agir des personnes concernées et produire des connaissances dans le même temps ? Ou réaliser l’un se fait-il toujours au détriment de l’autre ? Que faire de la subjectivité des savoirs expérientiels (Godrie, 2015) ? <br />Enfin, le troisième enjeu s’intéresse à ce que la MAG peut produire chez les personnes ressources concernées. Que faire et comment accompagner les prises de conscience, parfois douloureuses, dont nous avons fait l’expérience lors de la présentation des apports théoriques ? Comment soutenir l’empowerment et la lutte contre les injustices épistémiques (Fricker, 2007) ?<br />Les réflexions soulevées nous amèneront à discuter de la recherche collaborative au prisme de ce double enjeu : productions de connaissance et/ou développement du pouvoir d’agir ?<br />
Mots clés :
Épistémologie, Recherche, collaboration, méthodologie
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