L’incidence de la COVID-19 sur l’organisme communautaire <br />Plein Milieu à Montréal : des enjeux de reconnaissance

Année : 2022

Thème : Recherche : orientée vers la pratique, action, évaluative...

Type : Recherche : orientée vers la pratique, action, évaluative...

Auteur(s) :

JETTE Christian (Canada) – christian.jette@umontreal.ca
Paré-Tremblay Alexandra (Canada) – alexandra.pare-tremblay@umontreal.ca

Résumé :

Au Québec comme ailleurs, la pandémie a frappé de plein fouet l’ensemble des acteurs du réseau de la santé et des services sociaux et des milieux communautaires. Cette déstabilisation de l’écosystème des services sociaux a demandé aux organismes et aux communautés de revisiter les dispositifs de concertation et de partenariat auxquels ils participent, et de revoir plusieurs de leurs pratiques (Couturier et Fortin, 2021). C’est le cas de Plein Milieu, un organisme communautaire implanté dans le quartier du Plateau Mont-Royal à Montréal qui intervient depuis maintenant près de 30 ans auprès des jeunes en milieu scolaire, des personnes utilisatrices de drogues par inhalation et injection (UDII), et des personnes en situation d’itinérance (Plein Milieu, 2021).

Comme bon nombre d’organismes communautaires en contact direct avec la population, Plein Milieu a dû apprendre, selon la formule désormais consacrée, « à se réinventer » afin de répondre aux besoins de ses membres et de sa communauté. Cette nouvelle réalité semble avoir fait surgir avec encore plus d’acuité certains enjeux de reconnaissance et de légitimité institutionnelle (Leblanc, Bertrand et Loignon 2020). En effet, même si depuis 1991, la loi sur les services sociaux et de santé du Québec reconnait le milieu communautaire comme un partenaire incontournable du réseau de la santé et des services sociaux, les défis et les contraintes liés à cette collaboration intersectorielle semblent avoir été exacerbés par ce climat de crise sanitaire.

Le contenu de notre présentation est tiré d’une étude qualitative visant à documenter et à analyser les processus adaptatifs déployés par l’organisme au cours de la première année de la pandémie, soit du printemps 2020 au printemps 2021. Les évènements relatés rendent compte de l’impact et de la pandémie sur le personnel de l’organisme et les personnes concernées par les activités de l’organisme tant sur les plans personnel que professionnel. Ils rendent compte également des efforts menés par ces travailleuses du milieu communautaire pour protéger et venir en aide à des populations vivant des situations de marginalisation que le contexte de pandémie est venu exacerber.

À la lumière des résultats de notre recherche, il apparait que la situation a donné lieu à un double « déni de reconnaissance » tel qu’entendu par Honneth (2008), soit auprès des travailleuses qui ont ressenti une forme de mépris en lien avec leur contribution, mais également auprès des personnes avec qui elles interviennent - qui n’ont pas jouit de la même considération accordée à d’autres groupes marginalisés par les autorités sanitaires et gouvernementales. Malgré tout, l’organisme n’a pas pour autant renoncé à sa mission et subit de manière impuissante la situation. Au contraire, une lutte s’est engagée à la fois pour la reconnaissance, d’une part, des besoins des communautés marginalisées desservies par Plein Milieu dans le contexte de la pandémie, et d’autre part, pour affirmer son rôle auprès des autorités gouvernementales en tant qu’acteur essentiel dans la stratégie globale visant à contrer les effets délétères de la Covid-19 sur son territoire.

Le récit de cette lutte pour maintenir les activités de l’organisme s’avère au final une question politique dépassant largement le cas spécifique de Plein Milieu. Cette lutte concerne la reconnaissance et le respect accordés à tous ceux et celles qui travaillent au mieux-être des personnes vulnérables, mais aussi un enjeu de société concernant l’importance accordée par nos institutions aux activités du care qui permettent, comme le dit Tronto, de « […] maintenir, perpétuer et réparer notre monde, de sorte que nous puissions y vivre aussi bien que possible » (Tronto, 2012).

Mots clés :

Action communautaire, Justice sociale, Le travail de care

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