DESOMER Valérie (Belgique) – valerie.desomer@uvcw.be

Au départ du Centre de Formation de la Fédération des Centres Public d'Action Sociale (CPAS) wallons, nous partons du contexte des crises vécues par les travailleurs sociaux des CPAS et les personnes accompagnées.
Le 20 octobre 2021, la Fédération des CPAS a organisé une journée d’étude sur le travail social en CPAS, dans un contexte de crises multiples mais pas dans un état de sidération. Cette journée a permis de retrouver plus de 120 travailleurs sociaux des CPAS en présence. Depuis plusieurs années, les crise(s) sociétale, sanitaire, catastrophe naturelle bousculent les CPAS et plus singulièrement les travailleurs sociaux, qui sont durement impactés dans leur travail au quotidien. Tenant compte de la réalité multidimensionnelle vécue par les travailleurs sociaux des CPAS, il s’est imposé à nous plusieurs questions et constats qui ont été discutés lors de cette journée d’étude. Citons quelques-unes d’entre elles : Que recouvre le métier de travailleur social en CPAS à l'heure d'aujourd'hui ? Quel impact sur le travail social, lié à l’éclatement des aides sociales, à la complexification des modalités d’octroi, à la multiplication des circulaires ? Comment accompagner dignement et dans les meilleures conditions ? Quel regard (et solutions / outils) quant à l’augmentation d’une certaine « violence » à tous les niveaux ? Quelle refonte de la formation de base des assistants sociaux, comment faire des ponts entre la formation de base et la formation continue ? Comment « tenir » en tant que travailleur social en CPAS aujourd’hui, et en corollaire garder tout le sens de cette fonction ? Comment faire face à toutes ces crises entre aide sociale et aide humanitaire ? Dans quel état de santé mentale sont les travailleurs sociaux des CPAS ?
Cette journée d’étude a démontré l’importance d’échanger entre travailleurs sociaux des CPAS, de se poser les questions, d’avancer ensemble et de confronter les pratiques sociales. Un des objectifs est de faire une proposition d’un plan d’actions structuré autour de quatre grands thèmes à savoir, les conditions de travail au sein des CPAS, les modalités de travail au sein des CPAS, l’environnement du travail social et les relations avec les usagers.. Un point-bilan sera proposé par la Fédération des CPAS suivant les mesures qui auront pu être priorisées, opérationnalisées, soutenues et enclenchées, après 6 mois ou 1 an.

Voici maintenant plus de 12 ans que le Centre de Formation contribue à la construction d’une approche qui prend de l’importance dans l’action des services sociaux dans le monde occidental: le Développement du Pouvoir d’Agir (DPA) des personnes et des collectivités. A l’issue d’une recherche-formation menée avec le LADPA , à laquelle participèrent des travailleurs sociaux de CPAS et des professeurs de hautes écoles, département en travail social, nous sommes aujourd’hui en mesure de communiquer aux CPAS wallons le sens que nous donnons à cette approche. Nous proposons une formation visant à prendre davantage en compte cette démarche. Elle repose sur des fondements du travail social mais leur combinaison dans une démarche pédagogique et le retour à ces principes offre une perspective plus encourageante de la pratique sociale dans les CPAS.

La définition que nous donnons au DPA: "La capacité des personnes à exercer un plus grand contrôle sur ce qui est important pour elles, leurs proches ou leur communauté". Il s’agit ici de permettre, en travail social, que les personnes accompagnées puissent se positionner dans une posture de sujet autonome, qui n’est pas gouverné de l’extérieur, et ce sans que ne soit mis à l’œuvre l’injonction paradoxale qui nous fait dire à l’usager "Sois autonome!". Cette injonction relève aujourd’hui d’une réalité faite à chaque individu dans la société post-moderne de construire son propre destin alors que sont fragilisés "les grands récits" qui structuraient l’existence (par ex. Touraine, 2005). Encore que la pression sur les plus démunis pèse sans doute d’un autre poids, stigmatisés qu’ils sont et exclus de l’accès à ce qui peut aider à répondre aux différentes figures du sujet (voir encadré).
Mais quelle est donc la raison qui veut que l’on agisse tout de même pour développer le pouvoir d’agir des usagers? On en trouve l’explication chez le philosophe Paul Ricoeur (1990): "La souffrance n’est pas uniquement définie par la douleur physique, ni même par la douleur mentale, mais par la diminution, voire la destruction de la capacité d’agir, du pouvoir faire, ressentie comme une atteinte à l’intégrité de soi". Le Développement du Pouvoir d’Agir des personnes et des collectivités vise à rétablir les usagers dans leur position de sujet. Nous faisons le pari qu’il y a là l’opportunité d’une meilleure efficacité pour le travail social ainsi que de lui rendre du sens.
Nous baserons notre communication sur la constitution d'un groupe de travail en Travail social mis en oeuvre en mars 2022, qui sera composé de travailleurs sociaux de première ligne, avec comme appui de travail la co-construction afin d'échanger sur les modes d'interventions sociales en adéquation avec le contexte, les enjeux, les acteurs concernés et impliqués. Tout en ouvrant des pistes des possibles en termes d'accompagnement, de formation et de recherche-action en ciblant le vécu des personnes accompagnées. L'idée est de co-construire un savoir expérientiel sur le travail social de base en CPAS.