L’apport de l’initiation à la recherche sur les modalités de "présence(s)" dans la construction de la relation professionnelle avec les éducateurs de rue
Année : 2022
Thème : Analyse d'expérience : d'intervention, de formation, de recherche...
Type : Analyse d'expérience : d'intervention, de formation, de recherche...
Auteur(s) :
GARCIA Gilles (France) – gilles.garcia@etsup.com
LAHEYNE cédric (France) – gil.73@icloud.com
Résumé :
Dans le cadre d’une recherche collaborative réunissant formateurs, chercheurs, praticiens et travailleurs sociaux en formation professionnelle, notre ambition est d’étudier la manière dont se construisent les relations entre les acteurs, éducateurs en fonctions et jeunes accompagnés, au sein d’un service de prévention spécialisée francilien, après plus d’année de travail à distance, dans un contexte d’inégalités accrues post-pandémique.
La prévention spécialisée est une forme d’action éducative en direction de jeunes âgés de 11 à 25 ans, marginalisés ou en rupture ou en souffrance, lesquels, souvent, ne sont pas en demande, voire sont en retrait. Les éducateurs de ce secteur fondent leur pratique sur une présence de proximité par une immersion dans le milieu de vie des jeunes, en soutenant des actions de développement social local (Le Goaziou, 2015). Ces derniers représentent une part importante des jeunes déscolarisés, sans emploi et ne suivant aucune formation, parmi l’ensemble de la population de la même catégorie d’âge. De récentes statistiques ont également pu pointer pour le public jeune l’accroissement des inégalités sociales aux formes diverses et fluctuantes et la complexification des problématiques actuelles, notamment en termes de santé mentale (Chevalier et Loncle, 2021).
L’une des particularités de leur intervention est la nécessité d’une « présence sociale » sur le territoire. Il faut entendre par présence sociale une forme d’engagement dans la rue, appelée fréquemment « travail en rue », soit une présence dans les espaces de rencontre que les jeunes fréquentent. Mais cela ne se réduit pas à faire acte de présence sans que le corps y soit vraiment… La temporalité post-pandémique devient alors un observatoire rétroactif en interrogeant une désaffection supposée de la rue pouvant se traduire sur le terrain par cette opposition : « où étiez-vous ? versus « qu’est-ce que vous faites là ? ».
Si les effets des récentes politiques publiques sur les fonctionnements institutionnels ont déjà été étudiés (Chevalier et Loncle, 2021), les transformations contemporaines des pratiques des professionnels l’ont été beaucoup moins, et moins encore celles des pratiques d’accompagnement en terrains sensibles (Becquet & Vulbeau, 2015). En intégrant dans cette recherche les travailleurs sociaux en formation, nous souhaitons donc étudier la place et le rôle du corps dans les relations sociales (Le Breton, 2008), entre les jeunes suivis, leur famille et les éducateurs de l’institution. A partir de la prise en compte du corps comme lieu d’expression d’un bien-être ou d’un mal-être des jeunes accompagnés – à partir de l’évidence supposée donc – nous cherchons à vérifier en quoi cette prise en compte constituerait un moyen de construire et de maintenir la relation d’aide notamment quand :
-la dépense physique dans le cadre d’activités éducatives permet de construire et de maintenir le lien avec les jeunes ;
-il s’agit de développer un accompagnement à l’alimentation, à la santé physique et mentale, ou autour de la maladie, avant d’’entamer un processus vers l’emploi en particulier et l’insertion en général.
Si le bien-être subjectif consiste ici pour le jeune accompagné « à retirer une satisfaction personnelle à l’égard de sa vie en maximisant l’apport d’affects agréables et en minimisant les affects désagréables » (Goyette, 2014, p. 55), il peut représenter une première étape, relationnelle et émotionnelle, dans la trajectoire dit d’insertion sociale de l’individu, et professionnalisante pour des éducateurs de rue en charge d’accompagnement social de jeunes vulnérables. De moyen d’expression, le corps composerait une palette de modalités spécifique et démultipliée puisque l’observation concerne non seulement le binôme éducatif mais aussi les étudiant.e.s en formation. Il constitue à ce titre un élément central de la réflexion de l’apprenant sur son savoir dans l’action, dans le cadre de l’initiation à la recherche en centre de formation.
Mots clés :
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