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De l'expérience à l'expertise : Passer de l’expérience de vie à la construction d’une expertise

Année : 2022

Thème : Analyse d'expérience : d'intervention, de formation, de recherche...

Type : Analyse d'expérience : d'intervention, de formation, de recherche...

Auteur(s) :

PORTAL Brigitte (France) – portalbrigitte@gmail.com
PORTRON Arnaud

Résumé :

Pourquoi parler d’expertise concernant les personnes qui représentent les usagers du travail social ? Est-ce le terme le plus approprié concernant des personnes qui bénéficient d’un suivi, d’une prise en charge ou d’un accompagnement voire d’une mesure contrainte ?
Dans le langage courant, la notion d’expertise renvoie souvent aux connaissances acquises par un spécialiste dans un domaine donné. L’expert est un « super professionnel » qui détient un savoir que d’autres n’ont pas et qui peut être sollicité pour donner un avis éclairé.
« L’étymologie du mot « expert » rappelle que la compétence de cet expert se fonde avant tout sur un savoir-faire, acquis à force d’expérience : l’expertus latin, tiré du verbe experiri, est celui « qui a fait ses preuves, qui a de l’expérience, qui est habile ».
Selon cette acception, les intervenants détiennent une expertise professionnelle et les personnes qu’ils accompagnent possèdent également une expertise, certes différente, mais réelle. Celle-ci est issue de leur vécu, de leurs expériences de vie, de la connaissance de leur réalité et de leur situation. Nous reconnaissons cette compétence et la nommons expertise de vie, expertise d’usage et expérientielle des personnes.
Leur expertise, c’est aussi la possibilité de mettre à distance et d’analyser son expérience. L’expertise va au-delà du simple témoignage, elle nécessite de prendre du recul et amène des prises de conscience qui vont dans le sens d’une transformation.

Dans les expériences de co-écriture auquel Arnaud a participé et dans les échanges que nous avons pu avoir, il insiste pour que la parole d’une personne de la rue soit entendue et pour retransmettre sa propre voix .
Ces expériences ont produit des changements, par exemple un changement de regard sur les travailleurs sociaux et les institutions, également en termes d’acquisition de compétences.
Nous avons eu l’occasion de discuter sur les mots que nous utilisons à partir de la lecture d’un passage de l’article « Des mots et des sens » . Au sujet du mot « accompagné », il a pu m’expliquer qu’il l’utilise comme un raccourci de « personne accompagnée », ça va plus vite. Pour lui, c’est une personne qui a besoin de comprendre et admet ses difficultés sociales.
En se référant à l’article, il comprend l’importance d’utiliser la dénomination complète « personne accompagnée » qui traduit bien qu’elle est une personne avant que d’être accompagnée. En revanche, le vocable « personne concernée » ne lui convient pas car il peut désigner n’importe qui par rapport à une situation, et pas forcément une situation sociale.
Arnaud perçoit qu’il y a une différence fondamentale entre le discours oral et l’écriture : on peut revenir sur les mots écrits, ils sont fixés sur l’écran et en même temps on peut les modifier avant de les communiquer à quelqu’un d’autre. Ce qui n’est pas le cas des paroles qui interpellent directement l’autre.
Il a appris de ses expériences de co-écriture et il peut en parler. Il en a retenu des enseignements, il a mieux compris certaines choses qui lui sont utiles aujourd’hui et le seront à l’avenir. Au-delà, ce qui me paraît intéressant, c'est la réflexion sur le travail social, à laquelle ces conversations nous invitent.

Mots clés :

expertise développement du pouvoir d'agir conscientisation

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