DUPONT Nadia (France) – nadia_dupont@hotmail.com
SYLIN Michel (Belgique) – msylin@ulb.ac.be

Dans le contexte de cette recherche, nous comprendrons le handicap comme une construction sociale structurée autour de stéréotypes et préjugés. Nous posons comme hypothèse que ces construits se structurent à partir d’une trialectique fondée sur « l’Institution / l’Educateur / la Personne handicapée ». Nous considérons donc que ces trois éléments se structurent et se développent dans des dynamiques appréhendables via les représentations et attitudes.
Nous nous attacherons aux relations entre ces trois éléments de l’objet telles qu’elles se déclinent dans le secteur du travail social dans le cadre d’institutions pour personnes déficientes intellectuelles en région francophone en Belgique (Région wallonne et Bruxelles Capitale).
Comme tout secteur de l’action sociale, celui-ci fonctionne sous l’hypothèque d’un passé qui semble obérer la mise en place de nouvelles perspectives de travail. De plus, le contexte institutionnel est particulièrement complexe car il se structure dans la dynamique du millefeuille institutionnel caractéristique des réalités institutionnelles de la Belgique. Ainsi, ce type d’institution fonctionne avec un nombre important d’opérateurs, pouvoirs organisateurs, bailleurs de fonds et législateurs.
Au niveau de la praxis, les éducateurs, en référence à leurs préjugés et stéréotypes, dans leurs contextes de travail spécifiques, adaptent leurs fonctionnements et façonnent ainsi le quotidien des personnes handicapées. En d’autres termes, la construction sociale de la personne handicapée est intiment liée aux stéréotypes et préjugés du travailleur social en contexte. On suppose alors que cette construction est intégrée aux dynamiques psychosociales et in fine s’institutionnalisent et structurent la norme commune.
Au bout du compte, la personne handicapée intègre alors ces visions comme siennes et s’y conforme répondant ainsi aux attentes institutionnelles. Sorte de prophétie auto-réalisée.
Dans le cadre de cette intervention, nous procéderons par une mise en perspective de dynamiques historiques structurant les institutions pour personnes déficientes intellectuelles, le métier d’éducateur, et la construction du handicap tels qu’ils se conçoivent aujourd’hui en Belgique francophone. Cette première partie sera l’occasion de souligner les spécifiés du modèle belge en regard d’autres réalités européennes.
Dans un second temps, nous approcherons la construction des normes institutionnelles par le biais de l’analyse des attitudes, représentations et stéréotypes liés aux relations aux personnes dites vulnérables au sein d’une population de 550 sujets, étudiants éducateurs et travailleurs sociaux. Nous supposons que l’analyse des différences de perception entre ces populations peut-être considérée comme un indice significatif de la dynamique trialectique déjà évoquée.
Les résultats issus de cette recherche questionnent la posture du travailleur social. Entre le don de soi et la professionnalisation du service, il semble se construire comme des hiatus, sortes de zones noires, où la personne handicapée se structure sans support normatif. C’est là une difficulté supplémentaire pour la construction sociale de la personne handicapée. Cela impacte avec force la trialectique « l’Institution / l’Éducateur / la Personne handicapée » avec toute les implications pragmatiques que cela implique. Qu’il s’agisse de la gestion des institutions impliquées, des politiques sociales et des modes de gouvernance développées par les bailleurs de fonds et les acteurs politiques.
Il importe donc de penser et de développer des lieux de discussion et de confrontation des représentations de l’action sociale et de la personne déficiente intellectuelle afin de permettre une réelle construction de sens à son propos et par là permettre une approche complète et intégrée incluant l’ensemble des partenaires de l’action sociale.

Culture professionnelle, Usager, Institution