Trajectoire de placement et projet de vie des jeunes issus des minorités ethnoculturelles : Une pratique sous tension
Année : 2023
Thème : Recherche : orientée vers la pratique, action, évaluative...
Type : Recherche : orientée vers la pratique, action, évaluative...
Auteur(s) :
Leclair Mallette Isabelle-Ann (CANADA) – isabelle-ann.leclair.ccsmtl@ssss.gouv.qc.ca – Chercheur
Vargas Diaz Rosita (Canada) – rosita.vargas-diaz@tsc.ulaval.ca
Robichaud Marie-Joëlle (Canada) – marie-joelle.robichaud@uqo.ca
Résumé :
Dans le contexte actuel de crises multiples, un élément faisant écho mondialement est celui de la discrimination et du racisme. Au Québec, un récent rapport de la Commission spéciale sur les droits des enfants et la protection de la jeunesse (CSDEPJ) fait état de la disproportion des jeunes issus des minorités ethnoculturelles (MEC) dont la situation est prise en charge en protection de la jeunesse (PJ), ainsi que de la nécessité d’une adaptation des services aux besoins spécifiques de ces jeunes et leur famille (CSDEPJ, 2021). Le terme MEC fait référence aux enfants, aux jeunes et aux familles d'origine non canadienne, issus de l’immigration ou descendants d’immigrants.
Plusieurs études rapportent une surreprésentation des enfants des MEC en PJ (Lavergne et al., 2009; Sarmiento et Lavergne, 2017). Cette situation est préoccupante, ces enfants étant plus susceptibles de subir un traitement différentiel, voire discriminatoire (Lavergne et Dufour, 2020). Par exemple, selon Sarmiento et Lavergne (2017), 43% des enfants signalés en PJ à Montréal sont issus des MEC. Ceux-ci sont plus susceptibles de voir leur signalement retenu (68% des enfants noirs et 64% de ceux issus d’autres MEC) que les enfants non issus des MEC (30%). À l'application des mesures, leur poids relatif tend à augmenter, représentant 49% des enfants pris en charge. Cette étude fait aussi état d’une surreprésentation des enfants noirs signalés en PJ, qui représentent 20 % des enfants dont la situation est prise en charge alors que ce groupe constitue seulement 8,5% de la population à Montréal. Ces enfants sont plus souvent orientés vers des mesures judiciaires que volontaires (Sarmiento et Lavergne, 2017) et deux fois plus susceptibles d'être placés (Lavergne et Dufour, 2020). Ailleurs dans le monde, des études font état de différences en ce qui a trait à la trajectoire de placement des enfants des MEC. Par exemple, certaines ont trouvé que comparativement aux enfants blancs, les enfants noirs sont plus susceptibles d’être placés (Cénat et al., 2021; Watt & Kim, 2019), de rester plus longtemps dans le milieu alternatif (Foster et al., 2011), de vivre des changements de milieu de placement (Cénat et al., 2021) et une transition vers l'âge adulte à partir de la PJ (Watt & Kim, 2019).
Au Québec, les connaissances sur la trajectoire et le traitement différentiel des enfants placés issus de MEC sont limitées, malgré leurs conséquences durables sur l’avenir des enfants. Des aspects centraux de l’intervention en PJ, tels que la durée de la prise en charge, la durée et la stabilité du placement, les projets de vie mis en place et le soutien offert aux parents, n’ont pas été étudiés, ce qui nuit à la compréhension des spécificités de la situation du placement des enfants des MEC (CSDEPJ, 2021; Sarmiento et Lavergne, 2017).
Cette communication, s’inscrivant dans l’axe 4 de l’appel à proposition, vise à présenter les résultats préliminaires d’une étude mixte dont l'objectif est de comprendre les pratiques d'intervention visant la détermination d’un projet de vie permanent des jeunes des MEC qui ont été placés dans des milieux alternatifs. Un projet de vie « est une situation dans laquelle l’enfant se trouve à vivre de façon stable et permanente [dans] un milieu de vie [avec] une personne significative avec qui l’enfant vit et peut développer un lien d’attachement » (St-Jean, 2012). Nous nous concentrerons sur les résultats quantitatifs, découlant de données clinico-administratives d’un des plus important établissement de la PJ au Québec, afin de brosser le portrait des projets de vie et des trajectoires de placements de jeunes placés issus des MEC (n= 232, dont 120 enfants noirs et 112 issus d’autres MEC). Ce portrait sera comparé à celui de jeunes placés non issus de MEC (n = 244). Nous conclurons en discutant des pistes de solution pour contribuer au développement d’une pratique émergente concernant la prise en compte de la diversité culturelle dans la détermination des projets de vie permanents.
Mots clés :
Interculturel, Intervention sociale et travail social, protection de la jeunesse
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