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Pratiques professionnelles dans le champ de la précarité sociale : regard porté sur un territoire dans les Hauts-de-France.

Année : 2023

Thème : Recherche : orientée vers la pratique, action, évaluative...

Type : Recherche : orientée vers la pratique, action, évaluative...

Auteur(s) :

DELHAYE Pascaline (France) – pdelhaye@irtshdf.fr – Chercheur

Résumé :

La communication aura pour support une étude réalisée en 2022 par le pôle recherche d’un établissement de formation en travail social. Il y sera question de saisir le retentissement, sur la pratique professionnelle, de l’accompagnement de personnes en situation de précarité sociale et ce, en fonction des évolutions des politiques sociales, sur un territoire clairement circonscrit, celui de la Côte d’Opale située dans les Hauts-de-France. Ce territoire, comme bien d’autres en France et ailleurs, est hautement touché par la crise du logement.

La crise du logement, c’est en 2023 un taux de crédit immobilier qui grimpe, faisant chuter le pouvoir d’achat ; ce sont des transactions en recul, des constructions neuves en chute. Ce sont aussi 2,3 millions de ménages en attente de logements sociaux, une hausse des impayés de loyer dans les organismes HLM selon l’Union Sociale pour l’Habitat. C’est enfin 330 000 sans-domicile fixe (1) .

Sur ce fond de crise, le territoire de la Côte d’Opale donne deux images contrastées. D’une part, le littoral, ses grandes plages, ses caps, son arrière-pays vallonné, qui rendent ce territoire propice au développement des activités touristiques, ce qui correspond à la volonté politique. D’autre part, l’implantation des flux migratoires attirés par la proximité de l’Angleterre située à moins de 50 km de l’autre côté de la Manche, un territoire où le taux de chômage y est plus élevé qu’en moyenne régionale, et où les jeunes sont particulièrement touchés par la précarité et le chômage.

Des publics, jusqu’ici invisibles aux yeux des professionnels du travail social, basculent dans la précarité (De Vaumas, 2022). Et ces professionnels peuvent se trouver eux-mêmes dans des situations précaires (Nahmias, 2022) ou ne pas s’en sentir à l’abri (Pierret, 2013). Les vocables « précarisés » ou « précarisables » (Brière, 2015) témoignent de cette évolution.

Dans le même temps, les pratiques professionnelles évoluent, pour garantir au mieux l’accompagnement des personnes, par l’individualisation et le respect de l’autodétermination (Piveteau, 2022). Le mouvement de désinstitutionnalisation, initié par la recommandation du Conseil de l’Europe du 3 février 2010, poursuit son implantation dans les différents secteurs du travail social. Le Guide de bonnes pratiques du CEDIS (2015) en indique les trois principes fondamentaux : auto-détermination, responsabilisation, déstigmatisation.

En tant que refonte des modes de régulation de l’action sociale, cette évolution des pratiques peut néanmoins s’avérer délicat (Aballéa, 2014) : contraction des moyens financiers, marchéisation de l’action sociale, émergence de prises en charge hors-les-murs (à domicile ou en milieu ouvert) s’accompagnant de la dissémination des lieux d’intervention, une organisation à forme réticulaire, et usager censé devenir coordinateur des actions. La question est posée : « n’assistons-nous pas à une atomisation générale du travail social ? (…) Ou n’est-ce qu’une phase inachevée de la restructuration ? » (Hirlet et Pierre, 2017, p 113).

Dans un contexte de bouleversement post crise économique (2008) et sanitaire (2020), sur fond de crise du logement, et face à ce qui caractérise la précarité, à savoir l’incertitude, l’instabilité, dont ils ne sont pas eux-mêmes protégés, comment les professionnels évoluent-ils ? Comment s’invente la pratique des travailleurs sociaux ? La crise du logement fait-elle écho à une forme de crise des institutions ?

Après avoir apporté des éléments de réflexion autour de la précarité sociale et déployé notre problématique, nous présenterons le terrain d’investigation et le mode de recueil de données. Nous présenterons ensuite les analyses et engagerons des pistes de réflexion autour de ces pratiques qui pourraient être qualifiées de transfrontalières, à la frontière du soin, de l’assistance, de la protection et de l’éducation.

( 1 - 28è rapport sur l’état du mal logement en France 2023 – Fondation Abbé Pierre.)

Mots clés :

Précarité

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