Pourquoi plus personne ne veut devenir éducateur.rice : une question mal posée ? <br />

Année : 2023

Thème : Analyse d'expérience : d'intervention, de formation, de recherche...

Type : Analyse d'expérience : d'intervention, de formation, de recherche...

Auteur(s) :

LEGRAND laetitia (FRANCE) – laetitia.legrand@etu.askoria.eu – Etudiant
LABORIE amandine (FRANCE) – amandine.laborie@etu.askoria.eu
MEZENGE théry (FRANCE) – thery.mezenge@etu.askoria.eu
BOURGEAULT mathieu (FRANCE) – mathieu.bourgeault@etu.askoria.eu

Résumé :

Aujourd’hui, étudiant.e.s en 3e année en formation d’éducateur.trice.s spécialisé.e.s, nous remarquons des similarités dans nos vécus du parcours de formation. Ces réflexions émanent d’échanges entre collègues de promotion, d’entretiens, avec des professionnel·le·s de terrain et avant tout chose, de notre expérience d’étudiant·e·s.
Nous nous sommes mis d’accord sur une définition collective du mot “crise” : une période de changement créant une instabilité qui nécessite une réorganisation des forces permettant un retour à un équilibre. Dans notre parcours de formation, nous sommes plusieurs à avoir ressenti une phase que nous pourrions appeler “crise interne”, “existentielle”, “identitaire” ou encore “crise étudiante”. Celle-ci ne nous parait pas sans lien avec la crise que traverse actuellement le travail social en général. Nous faisons l’hypothèse que la crise du sens, inhérente au secteur de l’action sociale commence dès le début de la formation à ses métiers.

Comment comprendre ce phénomène d’abandons et d’interruptions, qui sont à hauteur de quasiment 50% dans notre école ?

La formation en travail social : un choix faible pour une majorité d’étudiant.e.s ?

Depuis la réforme de 2018, le processus de sélection à l’entrée en formation a été modifié. La sélection des étudiant.e.s passe désormais par la plateforme Parcoursup. L’épreuve écrite sur table a disparu, les candidat.e.s sont sélectionné.e.s sur la seule base de l’étude d’un court dossier sur Parcoursup et d’un entretien de motivation.
Ce nouveau processus de sélection a amené en formation un profil d’étudiant.e différent qui semblerait moins expérimenté, plus jeune et donc plus exposé aux bouleversements inhérents à la formation. Ce processus de sélection semblerait aussi avoir un impact sur le sentiment d’engagement des étudiant.e.s dans leur formation. Le choix que constitue la candidature via parcoursup est, d’après une expression de Laurent Ott, “un choix faible”.
De plus, le rapport au travail et donc aux études semble avoir changé. En effet, les étudiant.e.s d’aujourd’hui cherchent à prioriser une qualité de vie : un équilibre entre vie personnelle et professionnelle. Enfin, ne passant plus de concours écrits, iels se retrouvent en difficulté dans leur rapport à l’écrit pendant la formation, sans cette mise à niveau nécessaire.

Un secteur en crise : un étudiant vaut-il un titulaire ?

Nous observons également une nouvelle tendance du travail social, qui pour faire face aux burn-out à répétitions, conduit les institutions à se tourner vers les étudiant.e.s en formation, voire vers des personnes non formées via les agences d’intérim. Notre boîte mail étudiante est saturée de mails nous sollicitant pour des ouvertures de structures éphémères, des appels à projet ou encore pour combler des places vacantes au sein d'équipes au bord de l’implosion.
On peut donc imaginer que la perte de sens dans le travail quotidien des équipes socio-éducatives accentue la difficulté pour les étudiant.e.s à se construire une identité professionnelle saine.

Perte de sens ou problème de vocation ?

Il existerait donc une crise existentielle, un moment de remise en question au sein de la formation. Cependant, ce phénomène n’est pas nouveau et a toujours existé, selon nous il n’est pas la source des abandons.
Parmi les hypothèses de réponse à ce problème, nous entendons aussi parler “d’un manque de vocation”. Selon Ruggero Iori et Sandrine Nicourd, “Dès les bancs de l’école, les élèves devront intégrer “une série de dispositions de contradictions qu’il s’agira d’intérioriser sous la forme d’une certaine culture professionnelle”. Ils compléteront en ajoutant que le discours vocationnel occuperait la fonction de “support de protection”.
Pour nous, il n’est pas donc pas question de vocation. Nous préférons parler d’engagement.

Est-ce que finalement la question du manque d’attractivité dans le travail social et de la crise des étudiant.e.s en formation ne serait-elle pas mal posée ?

Mots clés :

Crise sociale, Culture professionnelle, Etudiant.e.s

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