BUKAKA Jacqueline (Belgique)

Depuis plus de trois décennies en R.D.Congo, particulièrement dans les grandes villes et autres milieux semis urbains, il a été constaté une augmentation vertigineuse des enfants des rues. Beaucoup d’études mettent en lumière les causes de cette fugue massive d’enfants vers les espaces publics mais la parole est rarement accordée aux enfants pour exprimer librement leurs ressentis sur la vie qui est la leur et leur représentation de la rue et de la famille.
Le phénomène enfant des rues est un fait social et un problème de société dans une Afrique en proie à la pauvreté, à des guerres incessantes, à la mauvaise gestion des biens publics, la dépravation des mœurs, au modernisme…
Si les crises économiques et politiques sont souvent évoquées pour expliquer l’explosion et la recrudescence des enfants dans les rues et les espaces publics des grandes villes, comment comprendre que certains enfants des familles aisées et ceux vivant dans le milieu stable (sans guerre) s’y retrouvent aussi?
Dans plusieurs cultures africaines, l’enfant représente le couronnement de l’amour des parents et celui par qui la lignée se perpétue. L’enfant est désiré et tant attendu dans une Afrique assoiffée de fécondité. Paradoxalement, c’est dans cette même Afrique que des enfants en bas âge se retrouvent hors de l’espace familial, condamné à élire domicile dans la rue en menant une vie de la débrouille.
Nous nous sommes interrogé ainsi sur les différentes représentations qu’ont ces enfants de la famille et de la rue et sur les ressources qu’ils utilisent pour faire face aux vicissitudes de la vie de rue aux quelles ils semblent bien se complaire contre toute attente car en le voyant, vivre ils donnent l’impression que la rue les attire et n’est pas si mauvaise pour eux.
L’analyse des récits narratifs des 23 enfants rencontrés dans les rues, dans les structures d’accueil et d’hébergement de Kinshasa, combinée à l’interprétation tests projectifs de famille et de rue (test que nous avons inventé) nous aident à faire une autre relecture du phénomène. Souvent non reconnu, la place et le statut de l’enfant passe de l’enfant désiré, ensuite à l’enfant victime et charge et enfin à l’enfant acteur social.

Secteur social, Utilité sociale, Responsabilité, Relation familiale, enfant de rue, parcours de vie