Faire communauté et en évoquer la mémoire par la médiation esthétique

Année : 2011

Thème : Fondements et pratiques du processus mémoriel collectif « Le 3e Œil »

Type : Recherche : orientée vers la pratique, action, évaluative...

Auteur(s) :

MAHY Isabelle (Canada) – mahy.isabelle@uqam.ca
LEMIRE Guillaume (Canada) – guillaumelemire@gmail.com

Résumé :

La mondialisation créée des turbulences dans le monde du travail qui change et se redéfinit souvent au détriment des humains. Alors que les organisations affichent une image publique responsable et engagée socialement, la logique économique entraine une valorisation de pratiques organisationnelles aux effets souvent déshumanisants. Minant l’énergie disponible et les capacités d’innovation, ces pratiques productivistes fragilisent le lien social, réduisant ainsi la force du collectif. Alors que les humains cherchent à faire communauté, ils ne trouvent que peu d’espaces de dialogue au sein des organisations. La perte de sens est réelle et ses impacts catastrophiques. L’augmentation des problèmes de santé mentale associés au monde du travail montre que la responsabilité des organisations est engagée et que des pratiques plus durables doivent être mises en place. Cette situation interpelle l’intervenant social qui propose des dispositifs d’accompagnement.
Pour contribuer à la reconstruction d’une humanité fragilisée par un contexte organisationnel toxique, un dispositif d’intervention qui soutient la création du sens de la communauté a été mis au point, en mobilisant la médiation artistique. Visant à créer des espaces d’exploration de cette quête de sens par une démarche réflexive et sensible, un processus créatif d’accompagnement de l’expérience et de la mémoire de cette expérience a été élaboré, à partir de terrains d’intervention comprenant, entre autres, le Cirque du Soleil. D’inspiration phénoménologique, ce processus se centre sur la création d’une mémoire. Il agit comme médiateur de l’expérience en la rendant visible, sous forme narrative. Le dispositif conçu à partir de pratiques citoyennes émergentes, mobilise le sensible et l’humanisme comme paradigme exploratoire de recherche. Ce dispositif contribue à l’innovation sociale par un processus d’intervention axé sur la création, l’animation et le soutien d’espaces de parole, et par le processus mémoriel associé à l’intervention, qui convoque des médias d’expression artistique. Par cette médiation, les savoirs deviennent des récits composés avec les acteurs, le sens donné à leurs réalités émergeant à travers l’action mémorielle. Les oeuvres narratives créées deviennent des données d’analyse de l’expérience collective utile à l’intervenant. Ces récits réflexifs proposent une mémoire bricolée à partir de l’expérience des acteurs.Ce processus d’inspiration phénoménologique dégage la rationalité, par une interrogation de la culture du travail, et le sensible, par celle des manifestations médiatisées par l’art. Des stratégies créatives sont mises en œuvre pour soutenir ce processus. L’exploration de cette médiation permet de faire émerger un double questionnement et des constats. Des pistes méthodologiques émergent de la mise en œuvre et des problématiques existentielles sont mises au jour, tout comme les dynamiques de changement à la source du sens de la communauté. Ces considérations mettent en lumière l’intérêt de cette modalité d’intervention. La toxicité des pratiques actuelles se révèle par contraste lors de la mise en œuvre de pratiques alternatives. Les effets néfastes de la pression aux résultats se manifestent dans des espaces de parole sécuritaires. Leur expression médiée par l’art participe à un subtil processus de transformation qui a des effets de reliance.
Les pistes proposées éclairent un impensé du développement durable, la nécessité d’opter pour des pratiques permettant de recréer le sens du collectif. Comme manifestation d’une responsabilité sociale assumée, ces actions permettraient aux organisations de gagner en cohérence entre discours et pratiques. Testée dans des contextes divers, cette pratique est utile pour l’intervenant chercheur dont le but est de concevoir des espaces réflexifs souples. Le dispositif présenté fait état d’une expérimentation effectuée en 2010 avec un groupe d’étudiants inscrits à un atelier sur le changement émergent et l’innovation.

Mots clés :

Changement, Co-construction, Intelligence collective, Mémoire collective ; créativité ; art social

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